Perspective de la colline

Publié le par Catherine Toulsaly

Perspective de la colline
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Cet article date d'il y a six ans. Il témoigne notamment de ma grande admiration pour William Blake. Aujourd'hui, j'y reviens à travers le regard d'Allen Ginsberg sur lequel Blake avait eu une profonde influence. Il y a un peu plus de trente ans, trois ans avant sa mort, il écrivait un poème intitulé New Stanzas for Amazing Grace* qui invite à la compassion au nom de tout ce qui nous lie, la Terre et l'univers:

J'ai rêvé que j'habitais un lieu sans abri
Où j'étais seul et perdu
Les gens me regardaient sans me voir
Et passaient avec des yeux de pierre

Ô main sans abri dans bien des rues
Accepte ces pièces de monnaie
Combien doux sont un sourire ou un mot amical
Comme des actes courageux de charité

Malheur à l'ouvrier qui entend ce cri
Et ne peut donner de son argent
Ni regarder dans les yeux sans-abri
De crainte de donner de son temps

Ainsi, riche ou pauvre, l'argent ne parle pas
Un sourire sur ton visage
Les sans-abri, où que tu ailles,
Recevront une grâce infinie

J'ai rêvé que j'étais sans abri
Où je me retrouvais seul et perdu
Les gens regardaient dans le vide
Et passaient avec des yeux de pierre

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Les comètes sont présentes dans les œuvres d'art et de littérature. Elles ont marqué notre mémoire collective. Le Fantôme d'une puce par William Blake atteste de leur passage dans le ciel. J'ai moi-même le vague souvenir de la comète de Halley par une lune matinale dans le ciel de Shanghai, lors de sa traversée du système solaire en 1986. Elle semblait, tout comme moi, impatiente que le temps passe et d'atteindre le rivage d'un havre de paix.

Aujourd'hui,  la comète de Halley a commencé son long trajet de retour dans notre direction.

Dans le cas de la comète 67P/Churyumov-Gerasimenko, visitée  il y a dix ans par la mission Rosetta de l'ESA, l'érosion par sublimation des composés volatiles avait créé des variations de hauteur allant de quelques mètres à des dizaines de mètres. Une falaise s'était effondrée et de plus gros morceaux de matière, comme celui nommé Churymoon, s'étaient détachés de la surface.

De gros blocs meubles environ cent fois plus fragiles qu'une neige fraîchement tassée avaient également été observés sur le lointain K2 (C/2017, PANSTARRS). La perte de masse ne se produit pas seulement à proximité du périhélie.

La conscience implique une volonté d'interagir avec son environnement. Elle demande d'ouvrir ses sens et son esprit. Tandis que Gregory Matloff s'interroge pour savoir si le mouvement des étoiles est volontaire, je me demande si les comètes font montre elles aussi d'un acte de volition.

Exocomètes, comètes interstellaires ou comètes en orbite autour du soleil, elles semblent faire partie du paysage des systèmes stellaires. Elles voyagent la tête dans les nuages avec leur longue chevelure depuis la zone de réserve du Nuage d'Oort, ou depuis la ceinture de Kuiper, ou encore depuis la région entre les planètes géantes sous la forme de Centaures, planétésimaux en attente de se transformer, ou encore depuis la ceinture principale d'astéroïdes, comme la comète Elst-Pizarro. 

Les comètes sont des corps étrangement allongés et le théâtre de processus géologiques fondamentaux. C'est comme si elles ouvraient la voie avec leur luminosité intense. Il en existe deux catégories : les comètes à courte période, dont la durée orbitale est inférieure à 200 ans, comme les comètes Holmes et 67P/Churyumov-Gerasimenko, et les comètes à longue période, dont la rotation orbitale peut prendre jusqu’à plusieurs millions d’années, comme la Grande Comète de 1997 (la comète Hale-Bopp) et C/2017 K2 (PANSTARRS).

La distribution orbitale des comètes à courte période met clairement en évidence deux populations : les comètes de la famille de Jupiter et les comètes de type Halley. D’après des simulations de migrations planétaires, il apparaît que les comètes de type Halley sont une extension de la population de comètes du Nuage d’Oort, à des périodes orbitales plus courtes. À moins d'être réapprovisionnées par des réservoirs externes, les comètes ne survivent pas. Leur durée de vie physique pourrait dépendre de la taille de leur noyau.

La comète de Halley n'est jamais entrée en collision avec une planète, contrairement à Shoemaker-Levy 9, qui orbitait autour de Jupiter pendant la majeure partie du siècle dernier, voire plus longtemps, avant sa chute il y a plus de 30 ans. Sa trajectoire était influencée par la petite Vénus, qui est le perturbateur dominant, jusqu'à ce que Jupiter ait pris le dessus.

Elle n'est pas non plus entrée en collision avec la Terre, contrairement à la météorite Orgueil tombée en 1864 près de Montauban dont l'orbite est compatible avec celle d'une comète de la famille Jupiter (une comète de type Halley ne peut être exclue). Elle ne s'est pas non plus désintégrée comme la comète C/2012 S1 (ISON) en 2013.

De nombreuses études ont suggéré la possibilité que nos planètes géantes aient éjecté des débris et des corps plus imposants hors du système solaire au cours de leur histoire. Je me demande si l'un de ces objets a jamais atteint un autre système stellaire ou s'ils sont restés figés dans l'espace interstellaire sombre et glacé. Malena Rice et Gregory Laughlin ont étudié ce scénario dans le contexte d'exoplanètes pouvant éjecter des débris de leur environnement. La découverte d'Oumuamua et de C/2019 Q4 (Borisov) révèle effectivement l'existence d'une abondance de petits corps flottants éjectés dans l'espace galactique.

La nature et l'origine d'Oumuamua restent toutefois obscures. Il aurait pu s'agir d'une comète dormante dont le noyau a été réactivé après des millions d'années dans l'espace interstellaire, propulsée par la sublimation de la glace d'eau. Avant de glisser vers cette zone intermédiaire, elle aurait pu être séparée de son système d'origine. Quant à la comète interstellaire C/2019 Q4, une étude a identifié une étoile double nommée Kruger 60 comme source possible. 

Un tohu-bohu de concepts défile non pas dans un langage mais en images dans mon esprit. Potentiellement porteuse de virus, la forme ronde et allongée d'une comète rappelle celle d'une bactérie dotée d'un flagelle qui l'aide à nager dans l'espace. L'étude des comètes est au cœur de notre recherche sur les conditions préalables au développement de la vie.

La mission Comet Interceptor dont le lancement reste prévu pour 2029 partira en quête d'une comète intacte afin d'analyser sa composition chimique, d'identifier ses composés organiques et de trouver des indices de vie microbienne. Les informations collectées pourraient nous renseigner sur un possible événement phylogénétique inconnu à ce jour ainsi que sur la période d'existence et les lignées d'anciennes molécules remontant au début de la formation du système solaire. 

Castalia, la mission proposée pour rejoindre la comète Elst-Pizarro, cherchera à savoir si une comète de la ceinture principale constitue une source viable d'eau pour la Terre. Pour l'instant, les scientifiques mettent en garde : la détection de quantités abondantes d'oxygène dans la chevelure de deux comètes, à savoir la comète de Halley et 67P/Churyumov-Gerasimenko, n'implique pas nécessairement une activité biologique. Les processus chimiques dans le gaz interstellaire, même de molécules simples comme l'oxygène et l'eau, restent incertains et sujet à débat. De plus, il reste à confirmer si l'oxygène observé dans les deux comètes ne se serait pas formé bien avant dans l'espace glacé nébuleux.

La conscience émane d'un sentiment d'appartenance. Elle constitue une tendance naturelle à voir son propre reflet dans le comportement familier d'une comète qui, affranchie des contraintes de l'existence, poursuit cahin-caha sa trajectoire excentrique. Aux confins du système solaire, elle erre au milieu des étoiles.

* Illuminated Poems, Allen Ginsberg & Eric Drooker, p.118

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Prologue à tous les possibles

Publié le par Catherine Toulsaly

Georges Lemaître* décrit un point d'origine « qui nous apparaît dans l'espace-temps comme un fond qui défie notre imagination et notre raison en leur opposant une barrière qu'elles ne peuvent franchir.» Notre pensée , écrit-il, « ne peut concevoir une pré-existence, puisque c'est l'espace même qui commence et que nous ne pouvons rien concevoir sans espace. » La génération de l'espace à partir du « temps zéro » prend la forme d'un processus d'inflation extrêmement rapide. C'est avec l'expansion de l'espace que naît le principe de localité. Ainsi, un point d'origine devient une sorte de singularité dont l'identification est intrinsèquement liée à la propagation de l'espace lui-même.

Force est de constater après l'article sensibilité et ressentis que nous nous engageons sur un terrain glissant lorsque les artistes viennent à la rescousse pour tenter de représenter l'invisible.

Les premières étoiles auraient apparu durant les âges sombres, comme si la première lueur du soir, au printemps, écrit Wallace Stevens, avait crée un nouvel univers à partir de rien en s'y ajoutant. Cela me rappelle aujourd'hui la citation de Tristan Garcia déjà parue dans l'article Formes de la pensée et Contours de l'univers qui nous interpelle profondément:  Qu'on puisse l'appeler néant ou rien, c'est « la forme en négatif de quelque chose sans ce quelque chose. Ce n’est donc pas le contraire de quelque chose, mais plutôt le contraire de quelque chose ajouté à l’absence de ce quelque chose ».

Whitehead décrit les quatre étapes créatrices par lesquelles l'univers est né actuellement. S'agissant de ses tout premiers instants, je mettrai en lumière les deux points suivants : les notions d'« origine conceptuelle » et d'« univers antérieur ». La question de l'existence d'un univers antérieur soulève un vieux débat entre des points de vue opposés. Si certains soutiennent que l'univers est une création ex nihilo, d'autres privilégient divers scénarios de modèles d'univers cyclique. Il semble que ces différents points de vue tentent de répondre à nos interrogations quant à savoir, notamment, si le temps a précédé l'espace ou a commencé avec lui s'il faut, une fois de plus, croire en la réalité d'un ordre chronologique universel.

La simple possibilité que l’univers soit sorti du néant va à l’encontre de notre penchant à croire en l'existence de « quelque chose » qui pourrait éventuellement être défini comme un vide primordial, détenteur paradoxalement de données d'information primordiales qui se seraient actualisées par le biais de la condensation et l'ignition.

Peut-on lier la notion d'« univers antécédent » à celle d'« origine conceptuelle »? Au tout début de notre univers, la question « qu'est-ce qu'a bien pu être l'univers dans sa nature ultime ?» relève du domaine de l'ontologie quantique, à savoir ce qui rendrait réel ce qui n'était que potentiel et si cela impliquait une forme de conscience. 

La science répond aux questions sur l'origine physique de l'univers par une chronologie détaillée quant à la façon dont l'inflation cosmique rapide s'est déroulée, comme si nous en avions été les témoins à chaque instant. Une infime fraction de seconde après le Big Bang, toutes les particules du modèle standard étaient déjà présentes. Avec l'expansion de l'univers, la température a chuté et la particule la plus lourde à notre connaissance – le quark 'top' et son antiparticule – a commencé à disparaître une picoseconde seulement après le Big Bang. Au cours des minutes suivantes, la quasi-totalité des espèces de particules, à l'exception des photons et des neutrinos, ont disparu une à une. Seule une infime fraction des protons, neutrons et électrons, constituant toute la matière de l'univers actuel, a survécu.

Alors que la science rend compte et développe l'histoire de l'atomisation du vaste continuum, nous nous demandons à quoi pourrait ressembler le répertoire ultime de représentation universel. Mais l'origine conceptuelle – c'est-à-dire en potentialité – reste l'incognoscible par excellence.

Qu'y a-t-il entre idée et matérialité, possibilité et réalité ? L'information semble être une condition préalable sous forme d'un univers conceptuel, prédécesseur de l'univers physique, sur lequel il se superpose. Elle impliquerait un processus de conversion de l'information en énergie. Que notre univers, aussi précisément réglé qu'il soit, évolue ou pas parmi d'autres dans un multivers en effervescence, il aurait commencé par un état quantique. L'existence de fluctuations quantiques pré-Big Bang, qui se seraient infiltrées dans l'univers, pourrait expliquer qu'un univers antécédent ait intégré la constitution du nôtre, « de manière à pourvoir à la base de son individualité naissante ».

Our fine-tuned universe is among others swimming in the bubbly realm of a multiverse (Google - Image FX)

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L'effondrement de la fonction d'onde captive l'esprit. J'imagine des fluctuations quantiques pilotant des particules virtuelles dans un champ quantique naissant et en constante expansion, conduisant à la superposition des univers virtuel et réel. 

L'information comme fondement de la réalité demeure cependant une réponse imparfaite, car elle évite la question de l'origine de cette information. Face à l'abîme ontologique que représente la perspective du néant, Jean-Paul Sartre décrivait une régression à l'infini, comme si nous avions ouvert une boîte de Pandore de laquelle jaillissaient sans fin des questions liées les unes aux autres.

We have opened a Pandora’s box from which a neverending series of related questions spill one after the other (Google - Image FX)

We have opened a Pandora’s box from which a neverending series of related questions spill one after the other (Google - Image FX)

Puisque notre raison ne se satisfait pas du concept de néant, certains envisagent la possibilité que nous soyons les captifs d'un univers virtuel ou holographique; d'autres vont jusqu'à affirmer que nous ne sommes que les pensées d'un « esprit » cosmique duquel nous ne nous sommes jamais extirpés depuis l'origine conceptuelle de l'Univers. Notre mort physique interviendrait-elle lorsque ces pensées s'évanouissent ?

Le fou sur la colline (voir l'article suivant), qui s'inspire des écrits d'Alexander, préfère fuir le déterminisme sous toutes ses formes et concevoir un scénario dans lequel l'information se révèle à elle-même en s'exprimant et, ce faisant, donne naissance à la conscience.

L'univers est une symphonie de lumières et de sons, jouée sur le clavier du temps.

Keyboard of time (Google - Image FX)

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*Georges Lemaître, L'hypothèse de l'atome primitif, extrait de la revue des Questions scientifiques, 20 juillet 1948

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Pensée symbolique

Publié le par Catherine Toulsaly

Je suis tombée par hasard sur Rubáiyát d'Omar Khayyám à travers l'artiste Elihu Vedder qui expliquait à ce sujet que nous sommes tous des maillons d'une chaîne invisible, un lien parmi des âmes sœurs. Qu'il s'agisse de rencontres en temps réel ou léguées au travers d'un patrimoine intangible, elles sèment en nos cœurs des sensations qui perdurent quant à une forme de pensée collective dans le temps et l'espace. Ainsi, nous sommes convaincus que nos paroles, nos actes et notre existence sèmeront une graine dans les esprits futurs.

John Locke a écrit que quelque chose existe depuis l'éternité, quelque chose qui a toujours été de par sa propre nature. Trois cents ans plus tard, Max Plank affirmait que ce quelque chose pourrait être une force caméléon par laquelle toute matière naît et existe. Dans ce jeu de relations référentielles préliminaires, tout ce qui existe devrait avoir, dans le temps et l'espace, une cause pour exister.

Les mots, signes et symboles que nous choisissons consciemment comme vecteurs d'expression, et leur traduction en termes de référence, dépendent de la liberté d'agir, nourrie par un sentiment intérieur ancré dans le temps. La raison voudrait cependant nous faire croire que, tout comme nous ne pouvons anticiper l'avenir, le caractère accidentel des événements nous empêche de concevoir toutes les étapes traversées et événements survenus dans l'histoire de l'univers depuis ses conditions initiales, et encore moins son état quantique d'origine autant que l'on puisse accepter la réalité d'un ordre chronologique.

Aussi difficile soit-il à dénouer, l'univers est une belle histoire que chaque génération s'obstine à écrire au fil de son exploration. À chaque carrefour, son histoire se divise sans cesse, ajoutant de nouveaux chapitres. C'est ce qui se produit, comme l'a souligné Steven Weinberg, chaque fois qu'un corps macroscopique émerge d'un choix d'état quantique. Choisir engendre une sorte d'hésitation comme celle observée par Georges Lemaître** (voir article suivant) quand l'univers, à ses débuts, ne s'est pas précipité entre deux périodes distinctes d'expansion rapide. « ... le rayon de l'espace, parti pratiquement de zéro, » explique-t-il, « a augmenté avec une vitesse de moins en moins grande et a atteint et dépassé lentement la valeur du milliard d'années où attraction et répulsion se faisaient équilibre, l'expansion a repris ensuite à un rythme accéléré ».  A-t-il pu y avoir des périodes de stase à d'autres moments de son évolution ?

C'est sur ce choix quantique que repose l'une des thèses de la formation du multivers. Il s'agit d'une chaîne d'univers nés de chaque nœud du fil du temps, à travers les événements passés, présents et futurs, créant ainsi un patchwork imbriqué. Quel que soit le reflet du premier instant kaléidoscopique, un fil a été cousu à travers les ombres, sur lequel les univers se sont incrustés.

To the mind’s eye, it is a string of universes brought into being at every knot made on the thread of time through chains of past, present, and future events, and so creating a tightly knitted patchwork. (Google - Image FX)

To the mind’s eye, it is a string of universes brought into being at every knot made on the thread of time through chains of past, present, and future events, and so creating a tightly knitted patchwork. (Google - Image FX)

Whatever the mirror faces of the first kaleidoscope-like moment, a thread was sewn through the shadows, on which universes expand (Google - Image FX)

Whatever the mirror faces of the first kaleidoscope-like moment, a thread was sewn through the shadows, on which universes expand (Google - Image FX)

Un débat théorique sur la composition structurelle d'un tel paysage soulève des questions comme de savoir si les composantes fondamentales varient à travers le multivers. Existe-t-il un ensemble global de méthodes et de lois et une relation entre elles ? Au-delà des frontières universelles, l'émergence se produit à des points de jonction, comme par les tunnels des trous noirs. On se demande donc s'il n'ya rien de simple au cœur de tout cela.

Mais plus on creuse, plus on exhume des faits complexes dont la forme et les aspects sont polydimensionnels. Sans être une entité physique réelle, le multivers peut être une structure polydimensionnelle dans laquelle des particules transfigurées et des forces transposables font échos. Les différentes dimensions contenues dans cette chambre de résonance vibrent à travers des parois invisibles.

La polydimensionnalité décrit la capacité des univers – physiques ou non – à entrer en résonance complexe les uns avec les autres. Si le hasard est un critère extensif, en quoi consiste cette extension et les composantes de ce hasard? À l’intérieur de la structure polydimensionnelle du multivers, notre univers par la matière et l’espace-temps fait circuler toutes les choses et leurs ressentis.

Sans les ressentis, le multivers n'aurait aucune résonance. Dans notre univers, la matière drape la géométrie. Comme la cavité qui apparaît dans la pomme parce que le pédoncule est là, la réalité apparaît lorsque l'espace-temps montre à la matière comment se déplacer tandis que la matière indique à l'espace comment se courber, comme s'ils étaient conscients l'un de l'autre. La matière est une apparence extérieure, une manifestation physique des perturbations périodiques de l'espace-temps.

Si aucune croyance n'est une île, aucune probabilité ne l'est non plus. Je veux dire que les idées ont un contexte. Les univers qui composent le multivers sont comme des îles dans un océan en constante expansion, apparemment détachés, voire isolés, mais intrinsèquement connectés. Chaque position dans le multivers démontre l'étendue des probabilités selon lesquelles une particule se trouve à une position donnée jusqu'à ce que cette probabilité n'a plus lieu d'être et est remplacée en temps réel par un fait d'observation.

Le multivers décrit un faisceau d'axes d'association possibles, dont les relations entre elles ne sont pas nécessairement en temps réel. La physicalité n'est pas ce que j'ai en tête. Les concepts de polydimensionnalité et de probabilité sont interdépendants dans le temps imaginaire. La perception est multidimensionnelle. Il existe une résonance informationnelle, au-dessus et au-dessous de la surface. Bien que révélée en temps réel par les moyens symboliques de la géométrie et des nombres complexes, sa source réside dans le temps imaginaire.

Ainsi, le processus d'attribution d'une interprétation fixe devient une extension de la théorie des probabilités. C'est un argument en faveur de l'existentialisme, dont le principe fondamental de liberté permet de conférer un degré de réalité à tous les faits, virtuels ou non. Il implique la manifestation en temps réel de l'espace-temps, sa fixation momentanée. Dans l'exploration de l'univers/multivers, science et philosophie cherchent ensemble à déchiffrer les conditions d'harmonisation au sein d'un tel corps de résonance.

L'information circule à travers un réseau de procédés symboliques tributaires de l'appropriation d'éléments devenant composantes de la réalité. C'est l'acte humain de perception qui rend possible l'interprétation de l'univers en temps réel.

J'ajoute à cette réécriture de l'article original paru il y a tout juste deux ans en anglais, que, pour Leibniz, qui, comme de nombreux philosophes et scientifiques des temps passés, tenait l'homme au sommet de la hiérarchie des êtres, il faudrait suppléer le terme 'aperception' à celui de perception. Il entendait par là qu'il faille être doué de conscience pour être en mesure d'interpréter l'univers. 

En fin de compte, ce que je questionne, c'est le concept même de réalité.

 

*Leibniz, La monadologie, 1714

**Georges Lemaître, L'hypothèse de l'atome primitif, extrait de la revue des Questions scientifiques, 20 juillet 1948

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Sensibilité et ressentis

Publié le par Catherine Toulsaly

Écrire pose la question du « pourquoi ». J'ai constamment besoin de mieux saisir toutes les raisons qui sous-tendent mon intention. Aucune voix, je crois, ne peut s'exprimer de manière significative sans se poser la question du « pourquoi ». Je me suis retrouvée à parcourir des articles écrits ces dix dernières années.

La conscience traverse un espace-temps multicouche. On se demande où elle se situe exactement, de l'atome aux strates de l'univers. Au niveau individuel, c'est la capacité de réflexion sur son propre processus de pensée. Faire une pause implique un acte de métacognition. Cela signifie prendre du recul pour analyser et observer les opérations de l'esprit. La même image me revient sans cesse à l'esprit, celle de mon corps à la dérive.

Chaque pas me coûte et commence ma réflexion qui embûche mon élan et initie ma pause ponctuée d’interrogations sur ma raison d’être et sur le monde environnant...

Pour Whitehead, la conscience « éclaire l'expérience qui la précède ». Il ne peut y avoir de conscience sans expérience passée, individuelle ou collective.

La « trace résiduelle » évoquée par Utpaladeva résonne lorsque je lis Whitehead sur la question de la mémoire. Il existe des éléments de souvenir dans la conscience, des étincelles dans les « recoins obscurs de l'Inconscient ».

The Unconscious is a labyrinth (Google- Image FX)

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Mais l'Inconscient est un labyrinthe. Comme dans un état onirique, des indices nous guident sur le chemin vers des lueurs de lumière et des fragments de mémoire. Le risque de tomber dans l'oubli motive notre quête.

De William James à Alfred North Whitehead, goutte à goute, les mécanismes de perception et d'expérience, que nous observons à l'échelle la plus petite comme à la plus grande, représentent un phénomène de « concrescence », un processus incessant de devenir dans un flot continu.

Whitehead parlait de l'action créatrice de l'univers dans sa capacité à rassembler des expériences individuelles qui accroissent sa multiplicité. La première étape de concrescence d'une entité réelle décrit comment l'univers participe dans la constitution de l'entité en question, dans la fondation de son individualité naissante.

Être, c'est simplement être un avatar dans la transmission d'information, une archive du passé. Dès la première cellule, le temps se retire dans l'inconscient et la mémoire se perd dans les nuages. Alors que nous nous interrogeons sur la formation de la matière au cours des premiers centaines de millions d'années et sur la manière dont les particules se sont agrégées pour donner naissance aux premières étoiles, certains constatent une analogie entre création artistique et création cosmique.

De fil en aiguille ; grâce à l'essai de Whitehead sur la cosmologie, je suis tombée par hasard sur les œuvres de Samuel Alexander. La question soulevée par John Archibald Wheeler : « Comment l'univers est-il né ?» n'est peut-être pas pertinente, a-t-il soutenu. Il faudrait plutôt se demander : « En quoi consiste tout simplement l'univers dans sa nature ultime ? ». Il expliquait que, tout comme l'objet observable se révèle par la réaction qu'il provoque et à laquelle il est confronté, « l'œuvre d'art se révèle à l'artiste à travers l'acte de création  qu'il s'arrache à lui-même dans son enthousiasme devant le sujet traité ».

Dans une réalité conceptuelle imprégnée de l'émotion du temps, je trouve révélateur que Whitehead ait choisi un mot aussi subjectif et évocateur que le ressenti en lien avec la sensibilité individuelle ou collective.

Parallèlement, David Bohm parle de petites excitations ondulatoires « quantifiées » sur un fond d'énergie spatiale. Bien que des termes comme émotion, ressenti et excitation puissent être empruntés, c'est parce que, en somme, nous ressentons plus que nous ne savons.

Un acte sensitif, écrit Whitehead, est « l'appropriation de certains éléments de l'univers comme composants de la constitution interne réelle » d'un objet. Pour lui, toutes les entités réelles, y compris les électrons, les atomes et les molécules, jouissent d'un certain ressenti, ne serait-ce que sous une forme rudimentaire.

Ma perspective sur la conscience cosmique met en avant une sensibilité conceptuelle qui s'intègre avec d'autres que les poètes affectionnent, par laquelle ils s'épanouissent et dont ils se nourrissent.

La question qui émerge de la lecture de Whitehead est de savoir si la conscience peut être dépourvue de sa forme subjective. Peut-il exister objectivement quelque chose au-delà de nous-mêmes, une conscience au-delà des corps individuels ?

Pour Whitehead, les ressentis « pris dans leur pureté originelle, dépourvus des ajouts issus d'intégrations ultérieures » n'impliquent pas de conscience, car la conscience est une « forme subjective apparaissant dans les phases supérieures de la concrescence ». Elle « illumine principalement la phase supérieure où elle apparaît » et n'« illumine les phases antérieures que de manière dérivée ».

La conception de Whitehead sur les ressentis doit être examinée à la lumière d'autres affirmations contemporaines relatives au language des émotions. À la question « Existe-t-il des ressentis à l'états pur ? » Si nous répondons par l'affirmative, écrit Ribot, « alors ils seraient considérés comme possédant, au moins parfois, une existence indépendante et non condamnés à jouer éternellement le rôle d'acolyte ou de parasite ».

Et si nous poursuivons l'analogie entre l'esprit et l'univers, nous pourrions considérer l'émotion du temps comme une « manifestation organisée» des ressentis, c'est-à-dire de la vie sensible universelle.

Ma conception des ressentis, aujourd'hui, ce 17 septembre 2025, bien qu'elle dérive de celle de Whitehead, diffère. La rédaction d'un essai sur la conscience ces derniers mois m'a permis d'en prendre la mesure.

Poets feel with their intuitional minds (Google - Image FX)

Poets feel with their intuitional minds (Google - Image FX)

C'est par leur nature intuitive que les poètes ressentent La conscience cosmique est un rassemblement d'ordre supérieur où des parties « flottantes » de nous-mêmes rencontrent des parties « flottantes » d'autrui. C'est à travers leur sensibilité que les poètes s'engagent dans un dialogue avec l'univers.

La conscience cosmique agit comme une ombre. Les ressentis se développent séparément « des objets auxquels ils sont rattachés ». Dans la création cosmique comme artistique, nous pouvons dire que la créativité est un état sensitif qui se nourrit de lui-même et de son environnement. Les poètes dans leur rêverie sont des âmes sensibles en proie au doute auquel, seul, le temps répondra.

L'intuition triomphera-t-elle de l'angoisse dans laquelle l'incertitude nous plonge ? Il existe, je le crois, des « phénomènes »  de type sensitif dans la matière organique comme inorganique.

Et lorsque nous nous interrogeons sur la nature accidentelle de l'Univers, qu'il soit né du libre arbitre ou selon un modèle déterministe, rappelons-nous que, pour Samuel Alexander, un artiste ou poète ne se forge pas automatiquement une idée au préalable. Pour le paraphraser, ils peuvent très bien n'avoir aucune idée de ce qu'ils veulent exprimer et découvrir ce qu'ils voulaient exprimer en l'exprimant, car ils n'ont généralement aucune image, antérieurement à leur œuvre, et ne savent ce qu'ils diront qu'après l'avoir dit. Cela leur vient comme une révélation, à  leur grand étonnement.

L'écriture et la sculpture directe sont, à mon sens, un voyage irrépressible et fragmenté, dont le but demeure un mystère. Sa clé, je l'espère, m'aidera à échapper au labyrinthe de mes propres méandres. Mais certains mystères échappent à l'imagination.

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Le Multivers

Publié le par Catherine Toulsaly

The mind pushes the bars of its prison, unaware of how much it wants to free itself (Google - Image FX)

The mind pushes the bars of its prison, unaware of how much it wants to free itself (Google - Image FX)

Les attentes sont la détermination par l'esprit de ce qui est possible. Telles des comètes fugaces et transitoires, les idées percent l'épais brouillard d'ignorance.

La clarté est emprisonnée, obscurcie par des couches d'émotions. L'esprit, lui, repousse les barreaux de sa prison, inconscient de son désir de se libérer. La discussion porte sur les frontières spatio-temporelles de l'Univers, de la question de savoir si ses caractéristiques quadridimensionnelles constituent tout ce qui existe, et jusqu'où s'étendent les limites du domaine ontologique.

L'Univers est une vaste mosaïque de faits locaux particuliers. Le continuum espace-temps, dans lequel les entités sont intrinsèquement seules dans leur processus interne, définit un ensemble de faits locaux dessinés comme des motifs spatio-temporels avec des lignes invisibles et des puits en spirale. Les entités, à  la nature répétitive, démontrent des sensibilités fragmentées. La sensibilité, je le rappelle, c'est s'approprier des éléments pour en faire des composantes de la constitution interne d'un sujet réel (voir article suivant). Isolé de toutes les conditions dans lesquelles ils existent, chaque fait local ne peut être pleinement appréhendé. Connaissance, sens et existence sont intimement liés. À mesure que les frontières s'élargissent dans le champ des possibles, elles révèlent un langage codifié, une écriture cosmique sur l'histoire détaillée  du Dialogue entre la Conscience et l'Univers.

Toutes choses, même l'Univers, véhiculent en elles-mêmes une incomplétude. Une nature holistique  implique une connexion nécessaire de tout le contenu. À l'intérieur de ses limites, l'Univers est un organisme présentant des caractéristiques particulières suivant les localisations spatio-temporelles de la paisible Voie Lactée a la formation intensive d'étoiles de galaxies plus lointaines. Au-delà de ses frontières, même l'Univers ne serait peut-être pas solitaire, mais un fragment de mosaïque – un membre d'une espèce.

 

From the surface of a page to the surface of a painting, poets and painters describe what rises from beneath the surface of things (Google - Image FX)

From the surface of a page to the surface of a painting, poets and painters describe what rises from beneath the surface of things (Google - Image FX)

De la surface d'une page à celle d'un tableau, poètes et peintres décrivent ce qui surgit de sous la surface des choses. Les philosophes l'identifient comme le royaume des potentiae. Sous la pointe de l'iceberg se trouvent des possibilités sur le point de surgir au moment d'une rupture de symétrie spontanée.

Elles sont mesurées par leurs probabilités correspondantes. Ce que signifie exister dans le royaume des possibles rappelle l'idée d'un multivers, l'infinité de possibilités adjacentes. De ce côté des frontières, nous le voyons comme étant un royaume d'incertitude où les possibilités non actualisées sont entravées.

Quant à l'Univers, sa liberté d'être est prise en otage par tout ce qui l'habite. C'est un déséquilibre permanent d'états éphémères, qu'ils soient de quelques millisecondes ou de plusieurs milliards d'années. Des séquences d'éléments se greffent à ses couches stratifiées, permettant à chaque niveau de stabilité de former des échelons irréguliers. Des périodes d'équilibre ponctuent ce déséquilibre, nous donnant une fausse impression d'avoir compris tandis qu'une gestation cachée se déroule dans l'ombre. La nature holistique des choses suit son propre rythme enfoui dans la marche du temps.

Les éléments dont l'identification précède toute appropriation possèdent une existence propre et indépendante. Mais de quoi l'Univers s'est-il approprié le cours de son propre destin, lui qui ne se connaît lui-même qu'à travers chaque parcelle d'expérience ? De quoi a-t-il hérité sa logique interne ?

Il existe différentes manières de concevoir les règles du jeu. De notre point de vue, l'Univers est régi par des lois qui correspondent à son contenu, et c'est à travers ce contenu qu' il établit les lois correspondantes.

Dans le temps selon le soleil, nous avons passé en revue les cycles plus longs. Des changements se produisent tandis que les structures s'étendent, se rétrécissent et s'effondrent. Des fissures béantes laissent apparaître des entités, des faits et de nouveaux points d'observation. Si nous observons la biosphère dans son ensemble à travers le prisme anthropique, aucun fait survenu ni aucune entité n'est isolé dans l'Univers. Nous observons le jeu du hasard parmi les flux et reflux, les forces expansives et cohésives, à travers les champs magnétique et gravitationnel.

La biosphère a construit son nid au cœur du champ magnétique terrestre en constante fluctuation. Le modèle selon lequel l'évolution se déroule par brèves poussées de changement séparées par de longues périodes de stase s'applique-t-il aux galaxies dont les périodes de formation rapide ont été entrecoupées de périodes de calme dans un passé lointain, lorsque moins d'étoiles se formaient ? L'être humain, individuellement ou en tant qu'espèce, connait-ils une stase prolongée jusqu'au prochain bond en avant ?

Pour un idéaliste, il y a une profonde connexion. Le néant et l'univers quantique ont fait émerger le hasard, qui est à la fois liberté, essence et existence – un seuil entre des univers, un milieu interuniversel, un processus qui vise à créer des résultats multiples au-delà desquels les paramètres macroscopiques de notre Univers prennent une signification au regard du contexte quantique sous-jacent dont elles émergent.

L'Univers quantique attribue des probabilités aux valeurs définies des données observables de chaque système. Cela nous ramène aux probabilités  de ce qui agit à l'extérieur selon ses lois censées régir les faits qui ne suivent pas de lois avec des lois qui ne le sont pas. Les pics de densité de probabilité marquent les points où les systèmes se structurent et surgir à la surface.

Ce qui est toujours en devenir renvoie à la notion de temps dans laquelle évoluent les systèmes quantiques – une non-localité spatio-temporelle d'où naissent toutes les circonstances. L'évolution, phénomène après phénomène, ajoute complexité et substance au domaine ontologique. Le hasard, dont naissent les faits, constitue le critère extensionnel. À l'intérieur comme au-delà des frontières de notre Univers, le principe fondamental demeure : le déterminisme, qui sous-tend l'évolution au niveau structurel, ne nie pas un profond indéterminisme dû à la contingence.

Nous nous demandons donc si ce qui sommeille au centre de tout cela est ontique ou nomologique. La fonction d'onde du multivers décrit la position de chaque particule. L'univers quantique observable qui rappelle la perspective de la grenouille n'est rien de plus qu'une infime partie de la fonction d'onde du multivers, qui pourrait bien être une représentation à la fois nomologique et ontique d'un champ généré par le flux des particules.

 

While the bird’s eye catches the exchange of mass and energy in our Universe’s inflows and outflows, the frog sees a quantum transactional exchange at the edge of the unseen (Google - Image FX)

While the bird’s eye catches the exchange of mass and energy in our Universe’s inflows and outflows, the frog sees a quantum transactional exchange at the edge of the unseen (Google - Image FX)

Dans le champ du néant et de l'univers quantique, la fonction d'onde agit comme une loi pour les particules qui n'existent pas encore pour qu'une telle loi puisse s'appliquer. L'effondrement de la fonction d'onde définit l'actualisation dans le multivers.

Tandis que l'œil de l'oiseau capte l'échange de masse et d'énergie dans les flux qui entrent et sortent de l'univers, la grenouille perçoit un échange transactionnel quantique aux confins de l'invisible, là où les conditions initiales sont confrontées à de multiples possibilités propices à leur durabilité. De là se séparent  les possibilités des faits réels. L'éloignement croissant dans toutes les directions crée les conditions de formation de sous-systèmes dans un état de déséquilibre d'où naît le temps.

La nature holistique se nourrit de la morphologie du temps, car les frontières multidimensionnelles sont fluides. Le long des routes morphologiques, l'idée de multiplicité émerge, surmontant la dualité entre ce qui est et ce qui n'est pas. L'esprit, à l'état de conscience, creuse des trous au fond d'un gouffre dimensionnel où subsiste le prolongement du soi. L'existence, qui émet les signes vacillants de la conscience, naît du franchissement de la frontière, à la croisée des chemins avec ce qui est autre.

The mind, may it be called Consciousness, digs holes at the bottom of a higher dimensional pit in which lives on the extension of ourselves (Google - Image FX)

The mind, may it be called Consciousness, digs holes at the bottom of a higher dimensional pit in which lives on the extension of ourselves (Google - Image FX)

Les entités circulent, comme si elles traversaient le seuil de portes tournantes, tout en veillant à la symétrie de leurs comportements. Lorsqu'elles occupent leur propre temps et espace, elles héritent leur haeccéité et conservent en elles-mêmes une présence intérieure miroir.

Pour un idéaliste, la transcendance est la projection de degrés de liberté des tous les côtés. Une petite excitation ondulatoire « quantifiée » du champ quantique est un dé lancé sur la planche du jeu infini. C'est l'arbre de l'île de Blackburn, car, tout comme lui, nous nous demandons s'il existe même une île sur laquelle l'arbre tombe. Une fois qu'un système se structure, le hasard régit les entités et leurs identités. Les règles du jeu dans le multivers pourraient expliquer pourquoi certains appariements se produisent et pas d'autres, pourquoi certaines particules ou certains champs n'interagissent pas entre eux, comme si ces non-faits étaient actés dans l'ombre.

Les entités du multivers sont en conséquence groupées et classées selon des catégories de dénominations. Que les lignes d'existence entrecroisées soient ou pas hors de notre champ de vision, les dés sont jetés. Hasard, destin et cyclicité interviennent. Sur les rivages du jeu infini, les récurrences alternent avec l'émergence de dimensions supérieures. Les lignes d'existence s'estompent dans une couche complexe de multidimensionnalité, ne laissant que l'instant présent se produire réellement.

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En notre propre lieu et temps

Publié le par Catherine Toulsaly

“Midway in the journey of our life,” Dante wrote, “I found myself in a dark wood, for the straight way was lost. Ah, how hard it is to tell what that wood was….” (Google - Image FX)

“Midway in the journey of our life,” Dante wrote, “I found myself in a dark wood, for the straight way was lost. Ah, how hard it is to tell what that wood was….” (Google - Image FX)

« J'étais à mi-chemin de mon voyage à travers la vie », écrivait Dante, « lorsqu'à la chute du jour je me trouvai dans une forêt obscure où je m'égarai.» Ah, comme il est difficile de dire ce qu'était cette forêt ! Chaque pas laisse une empreinte dans l'esprit et dénoue les fils de pensée qui s'entrelacent, suscitant le besoin de s'arrêter fréquemment lors de moments d'étincelles qui éclairent le cheminement de notre conscience face à  l'Univers.

Telle la cymbalaire des murs qui s'infiltre dans les plus infimes fissures, l'esprit erre. Les idées germinent.

En passant par Muir Woods, j'ai atteint Aotearoa et suis revenue avec un concept plus retentissant que les korimakos (méliphages carillonneurs) au pied des Pinnacles et les piwakawakas (rhipidures à collier) le long du lac Rotoroa : celui de la neurodiversité.

Le mot maori créé pour l'autisme est takiwatanga. Il signifie « en son propre temps et espace ». Si la neurodiversité fait référence à la multiplicité des états cognitifs, le concept évoque un faisceau de processus mentaux tous pertinents, tous ancrés dans leur réalité.

J'ai senti le contact des nuages ​​blancs, l'humidité de la brume et la proximité du ciel, comme il y a dix ans… Sur le sentier retranché le long du lac Rotoroa, j'ai médité sur la diversité cognitive, les divers états de conscience, les différents niveaux de sensibilité et la réalité d'une existence plurielle.

La liberté d'être règne sur la fragmentation. Quand on dit « diversité », on entend par là la liberté d'être en son propre temps et espace. « Quel effet cela fait-il d'être une chauve-souris ? » est une question qui revient à demander : « Quel effet cela fait-il de vivre en son propre temps et espace ? » Cela implique que la réalité extérieure n'est pas séparable du monde intérieur.

La promenade en forêt le long du lac Rotoroa reflète la façon dont j'ai perdu pied dans la forêt quantique. J'imagine un ensemble de valeurs et de coordonnées mesurant le corps d'un oiseau, sa position sur la branche le long du sentier et son champ de vision. Il aurait tout aussi pu s'agir d'une particule, d'une étoile, ou même d'un clin d'œil. Au son des avertissements émis par les piwakawakas, mon corps est en alerte et mes yeux se figent. Pourtant, je glisse et tombe dans la boue.

Bien qu'il demeure inconcevable de savoir jusqu'où vont les limites de l'Univers dans le temps et l'espace, et combien de dimensions s'étendent à l'intérieur et à l'extérieur de ces limites, Sean Carroll décrit une sorte de réalité stratifiée. « Si l'on imagine décrire la nature en termes de multiples niveaux de réalité », écrit-il, « l'un de ces niveaux apparaît comme une forme particulière de théorie quantique des champs, avec d'autres niveaux au-dessus et peut-être d'autres en dessous » et le noyau au cœur du champ quantique, où les entités, connues et inconnues, partagent temps et espace.

Au sein du néant et de l'univers quantique, les dimensions « compactes » élargissent le domaine d'existence ouvrant un champ de potentialités qui ne sont ni observées ni perçues objectivement. Puisque l'existence précède l'essence de l'information, on se demande s'il y a quelque chose et si cela appartient à une autre dimension. Des dimensions supplémentaires tracent des voies d'entrée et de sortie du champ existentiel. Si elles s'inscrivent dans la grille de l'espace-temps, elles sont étroitement imbriquées les unes dans les autres, ce qui rend leur identification difficile.

L'Univers est un organisme interactif comparable à un réseau de plantes et d'animaux, d'arbres et de champignons, d'oiseaux et autres entités qui meurent en une fraction de seconde ou au bout de milliards d'années, se nourrissent et pollinisent. Certaines de ces entités se fanent, ne disparaissant qu'après avoir produit des graines, tandis que d'autres continuent de prospérer. C'est peut-être pourquoi, comme l'a observé John Muir, « Lorsque nous essayons d'identifier une chose en soi, elle est rattachée au reste de l'Univers.»

Notamment, nous ne parvenons pas à observer un seul quark, car « les quarks n'existent pas en tant que particules individuelles » dans l'univers quantique. Les particules circulent dans des rivières quantiques invisibles, portées par des vents et des courants au-dessus et au-dessous du lit des rivières, au-dessus et au-dessous des eaux marines, au-dessus et au-dessous du sol, emportant des graines à des années-lumière, des fils microscopiques reliant des filaments et des galaxies. Des signaux gravitationnels sont envoyés le long de ces voies comme des nutriments.

Au bout du compte, il existe une distinction entre le néant et l'univers quantique lorsqu'une interaction est observée, tout comme les rêves qui n'ont qu'une influence très faible, captant difficilement notre attention. « Newton lui-même », écrit Frank Wilczek dans The Lightness of being, « utilisait généralement l'expression 'quantité de matière' pour ce que nous appelons aujourd'hui la masse. Sa formulation implique qu'il ne peut y avoir de matière sans masse. » Si nous reconnaissons son existence, nous supposons qu'elle a une masse, même si nous ne pouvons la mesurer comme une particule vectrice de force au seuil de dimensions supérieures.

Wilczek écrit dans A Beautiful Question que la conservation de l'énergie est un principe « utile mais approximatif qui s'applique dans des circonstances limitées ». Une possibilité reste que l'énergie conservée du système réside dans des variables cachées, ou que nous « ne puissions tout simplement pas la reconnaître », concède Carroll. Si une dimension est une quantité physique mesurable, une particule vectrice de force peut être une unité relative destinée à l'encapsuler.

Les photons et les gluons sans masse sont des fragments d'information, des « idées incarnées ». Que les sous-particules soient le produit de l'esprit ou le résultat d'observations, face à une telle incertitude, ce que nous ne pouvons pas voir devient une question de probabilité. Le problème, expliquait De Finetti, est qu'au lieu de considérer et d'étudier la probabilité telle quelle, en essayant d'en parfaire sa compréhension et son utilisation, nous l'extériorisons comme si nous croyions pouvoir la représenter, sinon comme un objet réel, du moins comme quelque chose qui existe en dehors de nous, « quelque chose qui agit sur le monde extérieur selon ses propres lois, censées régir les faits qui ne suivent pas ces lois, avec, en plus, des lois qui n'en sont pas ».

Il en va de même pour les particules que nous disons exister en tant qu'entités distinctes, en plus de la fonction d'onde, qui, elle-même, s'actualise. La fonction d'onde – lien entre les entités – « guide les particules », écrit Carroll, « mais les particules n'exercent aucune influence sur la fonction d'onde. » En revanche, si, comme l'écrivait Sartre, « il y a un être de la chose perçue en tant qu'elle est perçue » , il y a aussi un être de la chose pensée en tant qu'elle est pensée, même en tant que probabilité.

Un nombre déterminé d'étapes évolutives sépare zéro d'un état individuel subjectif dans le temps. Chaque entité, grande ou petite, se regroupe en une expérience unidimensionnelle qui, s'additionnant, crée l'univers multidimensionnel que nous connaissons. L'unité du néant et de l'univers quantique renvoie à un en-haut et un en-bas – les champs ultra-légers de la matière noire qui s'ouvrent sur des dimensions supplémentaires, comme dans un rêve où des papillons translucides et en apesanteur s'échappent lentement par des portes obscures.

Il y a un mois, je suis rentrée chez moi. Un moineau domestique se reposait sur la branche d'un jeune chêne. Sa condition existentielle offrait un dernier aperçu de la neurodiversité et de la biodiversité qui nous entourent. À la limite de l'entre-deux, je me suis mise à imaginer tout ce qui existe dans le cosmos et sur la Terre.

Des voix résonnent dans ma tête – des fantômes  qui me hantent et me poussent à poursuivre mon exploration – car il y a tant de rêves, mais si peu de temps… Une seule lettre différencie les mots artiste et autiste.

Le concept de double empathie reconnaît un manque de connexion et une mauvaise communication entre les « acteurs sociaux aux dispositions différentes ».

Faire le deuil de ce qui n'a jamais existé pour lever le voile sur nos croyances limitantes et faire tomber nos œillères pour que tous les niveaux deviennent visibles, car nous portons en nous la vision de l'aigle, le battement d'ailes du papillon, les capacités d'écholocation de la chauve-souris, l'instinct du tamia et l'âme de l'éléphant.

We carry within the bird's eye view, the butterfly's flapping wings, the bat's echo-sensing abilities, the chipmunk's instinct, and the elephant's gentle soul (Google - Image FX)

We carry within the bird's eye view, the butterfly's flapping wings, the bat's echo-sensing abilities, the chipmunk's instinct, and the elephant's gentle soul (Google - Image FX)

Fiorentino, P. A. (1887). La divine comédie. Extrait. France: (n.p.).

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Le néant et l'univers quantique

Publié le par Catherine Toulsaly

L'autre soir, j'ai perdu la Lune derrière un voile de nuages. Elle était perplexe quant à la manière dont l'organisme universel planifiait chaque étape en coulisses. L'unité du néant et de l'univers quantique suggère la difficulté de devoir les dissocier, comme si la structure primordiale était la rencontre du haut et du bas de la surface, le tracé d'une ligne floue, sans « filaments d'ordre personnel ».

L'esprit pénètre dans la forêt quantique. Il en effleure à peine la surface et se sent déjà désorienté, gravissant des collines d'apprentissage et de connaissance, se demandant s'il pourra un jour résoudre le problème de la nature de la réalité et, sinon, à quoi tout cela aura servi.

Du haut des montagnes, il domine des écumes de particules au charme, à la beauté, aux couleurs et aux saveurs cachés et ouverts. Il observe des champs de neutrinos insaisissables, des milliards d’entre eux, qui passent à travers, dont les sources naturelles incluent le noyau terrestre, les réactions de fusion dans le soleil, l’atmosphère, les supernovae et d’autres sources émettant des neutrinos comme, peut-être, le sursaut gamma brillant et long GRB 221009A observé l’automne 2022.

La figure inversée du Jongleur entre en scène. Dans le miroir, elle a la tête en bas comme le pendu et fait un pas en arrière dans l'investigation phénoménologique d'une période émergente qui mettrait en jeu une structure singulière, peut-être une sphère ou encore un Big Bounce quantique. 

 

Is the Universe a tree whose roots reach the depth of the dark sector, or is it more like a loop with one end in the dark? (Google - Image FX)
Is the Universe a tree whose roots reach the depth of the dark sector, or is it more like a loop with one end in the dark? (Google - Image FX)

Is the Universe a tree whose roots reach the depth of the dark sector, or is it more like a loop with one end in the dark? (Google - Image FX)

L'Univers est-il un arbre dont les racines atteignent les profondeurs du secteur obscur, ou plutôt une boucle dont une extrémité est plongée dans l'obscurité ? Une image miroir implique une conscience de ce qui entre et sort au seuil du temps. Elle renvoie à un échange implicite dans les processus de décomposition, depuis et vers un secteur caché, entre ce qui est caché et ce qui est révélé. Sur un champ caméléon, des scènes d'échange deviennent visibles.

Plus la nature est analysée par fragments, plus nous découvrons des dimensions supplémentaires, liées à un continuum dimensionnel supérieur. Ces dimensions supplémentaires nous apparaissent principalement comme étant spatiales, mais la cessation et la succession des cyclicités physiques et biologiques nous révèlent autre chose : des intervalles entre ce qui est, ce qui est passé et ce qui sera, tous suspendus à la même ligne de temps continue.

À mon avis, le néant représente une scission entre toutes les entités réelles, qu'il s'agisse de quarks des secteurs up et down ou de galaxies entières. Le néant disparaît sous les vestiges de ce qui est passé, sous-tend ce qui sera, hante ce qui est et représente l'absence dans l'intemporalité.

Chaque découverte et chaque observation subséquente deviennent un autre constituant fondamental de la matière observable et fissurent le secteur obscur. Y a-t-il toujours eu quelque chose ? La conservation de l'énergie dans les recoins obscurs pourrait garantir l'homogénéité et la viabilité de l'ensemble du système universel au-delà des horizons. La question essentielle est de savoir si chaque rupture contient les germes de gravitation quantique et si un espace-temps quantique donné reproduit ce qui s'est passé dans l'univers quantique originel.

L'univers primitif a suivi sa propre chronologie. Il existe un ordre d'apparition : après une époque primordiale d'inflation cosmologique et le Big Bang, les quarks et les gluons ont évolué dans des degrés de liberté infinis pendant une fraction de temps étonnamment plus court qu'un clignement d'œil. Un mécanisme d'inflation, alimenté par l'hypothétique inflaton, aurait précédé le Big Bang et le plasma quark-gluon. Les inflatons se sont-ils désintégrés en gravitons ou en d'autres particules cachées ? La force gravitationnelle dissimule son origine quantique dans l'ombre.

Dans l'univers quantique, des vagues d'énergie s'échouent sur nos rivages. Des structures subatomiques se désintègrent tandis que d'autres se forment, à travers un cycle de vie et de mort, comme s'il existait une tentative consciente d'avancer. S'il n'y a aucun filament d'ordre personnel dans une graine gravitationnelle quantique, comment pourrait-elle servir de base à l'absorption et à l'émission de quantités discrètes d'énergie ? L'unité des ondes et des particules offre un paradoxe : formes discrètes et champs continus. Surgissant de l'ombre, l'univers quantique pourrait avoir commencé par des particules ponctuelles et un champ de Higgs. Ce champ de Higgs peut-il générer de la masse et être à la fois le vecteur de la gravité par interaction avec d'autres particules ?

Au-delà du boson de Higgs, comment imaginer des quantités discrètes d'énergie sans masse ? Ce qui semble s'en rapprocher le plus sont les neutrinos. La faible masse de ces derniers suggère qu'ils véhiculent une sensation d'absence. Les neutrinos parcourent de longues distances et traversent de grandes densités grâce aux interactions faibles et à la gravité. Encore plus petits que les quarks up et down et les électrons, ils sont électriquement neutres et constituent les leptons les plus légers. Lorsque le plasma a commencé à refroidir, les neutrinos primordiaux se sont propagés dans le gaz chaud de baryons et de photons moins d'une seconde seulement après le Big Bang et pendant la phase d'expansion qui a suivi.

Parmi les porteurs de force, on trouve les photons et les gluons sans masse. La force forte des gluons, la force électromagnétique des photons, la force faible des bosons W et Z et la force gravitationnelle permettent aux connexions de se faire et aux liens de se former entre les particules et la matière, comme si les porteurs d’énergie canalisaient des morceaux de « vie » et de « conscience ». Les bosons porteurs d'une force pourraient-ils être ce qui fait de l’Univers un organisme ?

Nous nous demandons si le temps existe réellement lors des premiers instants de l'Univers et si les particules éphémères envisagent la perspective d'un avenir. Y a-t-il eu un écoulement temporel pour les axions, les tachyons, le Higgs ou d'autres particules primordiales inconnues ? Aux portes du Néant, la matière de construction la plus courante – quarks up et down et électrons – forment tous les wagons du train universel. Les quarks considèrent-ils l'hadronisation comme leur mission vitale ? Que ressentent les protons face à la marche du temps ? Un proton dans son enveloppe éternelle ignore ce que ressent l'être humain.

Comme Ruth Renkel, Lee Wilson Dodd (1879-1933) était un écrivain prolifique. Ses poèmes et écrits sont aujourd'hui enfouis dans les archives de journaux et de magazines tels que The Atlantic, The New Yorker et The Nation. On lui doit la citation suivante : « Combien ai-je cherché sans trouver! »

Dans l'infiniment petit, les quatre attributs ont-ils une importance ? Le concept des quatre composantes temporelles pourrait-il trouver sa place dans le Néant et l'Univers quantique ?

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Quatre Notions

Publié le par Catherine Toulsaly

The horse with no name jumps out of the Eagle Nebula (Google-Image FX)

The horse with no name jumps out of the Eagle Nebula (Google-Image FX)

Le cheval sans nom jaillit de la nébuleuse de l'Aigle.

« Qui suis-je ? » demande-t-il en tirant un char invisible dont les roues à trente rayons tournent sur elles-mêmes aux points cardinaux de l'Univers.

L'Aigle aux ailes sombres jette un coup d'œil au cheval et grave sur son passage une énigme : « Qu'est-ce qui est, est passé, sera et est toujours en devenir ? » Le cheval glisse à travers les nuages ​​terrestres suspendus à la voûte céleste et s'immobilise sans répondre.

Alors qu'il surplombe de ses yeux perçants l'espace-temps quadridimensionnel aux éléments de feu, d'eau, de terre et de vent, l'Aigle lance un cri : « Le Temps. »

Au fil des saisons, le cheval continue d'imprimer, de ses sabots, les anneaux d'étoiles dans le bois des arbres.

The horse's hoofs prints rings of stars into the wood of trees (Google - Image FX)

The horse's hoofs prints rings of stars into the wood of trees (Google - Image FX)

Un univers sans forme implique l'integration en une seule réalité des quatre dimensions. Puisqu'il n'y a pas de forme, il n'y a pas d'entité divisée à l'origine.

Les âmes sensibles s'interrogent sur leur relation à l'Univers depuis la nuit des temps. Les idées sont des graines issues d'une pensée philosophique antérieure, plantées dans le sol de nouvelles terres adaptées à leur croissance. Nous sommes des semeurs de graines en quête de réponses, reprenant là où d'autres se sont arrêtés, dans une approche participative à travers le temps et l'espace.

Il existe un double écran de perceptions et de conceptions. Nous pouvons les séparer et observer la projection de leurs ombres et leur interaction. Il y a une correspondance entre les quatre perspectives temporelles et les quatre attributs d'un soi, d'une âme, d'un être et d'une entité.

Whitehead écrit que la forme est de manière générale un objet complexe durable. Pour lui, « durable » n'exclut pas qu'elle change à travers le temps et l'espace. Les entités durables évoquent des cycles plus longs et des processus imbriqués. La façon dont chaque entité confronte la réalité dépend de la relation entre les quatre composantes temporelles.

Qu'est-ce qu'une âme si ce n'est le souffle de la conscience? Une mémoire flottante se dilatant librement comme un gaz. Une étincelle quantique dans un champ magnétique.

Même les mots ont une âme. Par âme, j'entends une essence éthérée qui grandit et transcende. Elle est indissociable de la conscience cosmique. On peut s'interroger sur le cheminement spirituel de l'âme, s'il précède la recherche d'un hôte et si les quatre attributs forment une chaîne hiérarchique. Si l'âme est antérieure à l'être, elle peut provenir d'un lieu antérieur pour participer à la fondation d'une entité réelle. L'âme trouve-t-elle sa demeure là où la lumière la touche ? Et une fois qu'elle a trouvé sa place dans le corps humain, se loge-t-elle dans le cœur ou dans l'esprit ? 

La différence réside dans les strates temporelles. Chacune offre une perspective différente. L'intemporalité est ce qui est toujours en devenir. C'est le lieu de l'âme. Ce qui est passé demeure en soi, rigide comme un roc, accroché aux faits survenus, aux états passés. Ce qui est est intrinsèquement lié à l'action et la liberté de l'être. Ce qui sera porte en soi l'aspect quintessentiel de ce qu'il reste à devenir. C'est ce vers quoi une entité réelle – une personne ou un organisme – tend, planifiant les prochaines étapes en coulisses pour servir son objectif d'actualisation.

Whitehead affirme que même l'Univers, à n'importe quel stade de son expansion, s'accorde avec le sens premier du terme « organisme ». Mais l'organisme universel peut-il se révéler en s'exprimant et se connaître à travers chaque parcelle d'expérience tout en planifiant ses prochaines étapes sous la surface ?

Les quatre attributs se dissocient et fusionnent comme des taches sombres à la surface du soleil. Ils se rassemblent, se mélangent et se divisent. Ils acquièrent les caractéristiques de conscience, de subjectivité, d'intentionnalité et d'agentivité.

La conscience est le processus qu'entreprend l'âme. La subjectivité est ce à quoi le soi ne peut échapper. L'intentionnalité est ce qui définit l'existence de l'être. À l'échelle du système, le principe ontologique de Whitehead fait référence au concept d'« existence ».Toute « bouffée d'existence » ou « goutte d'expérience » est, en soi, la seule raison. Chercher une raison, écrivait-il, revient à rechercher tout ce qui est « positivement quelque part dans l'actualité, et en puissance partout ».

Rien devient une non-entité au-delà de la forme et du sans-forme. 

L'agentivité désigne la relation entre une entité réelle et un groupe ou une société. La « société » est une géométrie de l'ordre social. Elle peut s'appliquer à un groupe d'étoiles, à une catégorie de galaxies, voire à un amas de nuages ​​passagers. Toute cohésion entre entités réelles souligne les liens entre les âmes et les relations entre les objets, les entités et les individus. Bien qu'il puisse exister une parenté « génétique » entre les membres, il devient, avec le temps, impossible de déterminer les éléments distincts. Nous percevons la totalité d'un corps, mais ignorons ses parties et, de ce fait, le système holobiontique qui nous habite.

L'organisme universel est un tissu complexe de géométrie et de matière. Dans sa forme initiale, il est façonné par une géométrie d'entités ontologiquement antérieures.

Notre soleil est un cercle et nos corps sont des lignes verticales, les pieds au sol et la tête dans les nuages. Nous sommes des cordes, petites et grandes, capables d'émettre des sons. Et au sein d'une telle géométrie se trouve un Univers sans forme qui dévoile sa simplicité.

 

Reality displays a landscape of boxes in boxes. Within the boundary of each box is a mindscape that only catches a partial view through pierced holes that let sun rays shine in (Google - Image FX)

Reality displays a landscape of boxes in boxes. Within the boundary of each box is a mindscape that only catches a partial view through pierced holes that let sun rays shine in (Google - Image FX)

La réalité présente un paysage de boîtes empilées les unes dans les autres. À l'intérieur de chaque boîte se trouve un paysage mental dont on ne perçoit qu'une vision partielle à travers des trous percés laissant passer les rayons du soleil. Il ya différents degrés d'action, de sensibilité et de conscience, niant ainsi l'absence de sensibilité. Une interprétation moderne du bouddhisme soutiendrait que si les entités avaient été insensibles et dépourvues de graines de semence, la réalité structurée à tous les niveaux, qu'elle soit physique ou spirituelle, n'aurait rien produit. Ainsi, si l'âme de l'Univers – la source de la conscience – est indivisible de toute entité, elle est simultanément individualisée en chaque entité, dispersée en échos et en âmes miroirs.

Au contact de leur environnement, les entités sont malléables. Métaphoriquement parlant, elles se courbent, s'écoulent ou se figent comme l'eau. Elles peuvent être dotées de corporéité, de sensations, de perceptions et d'un acte de volition au sein de leur conscience, à l'instar des systèmes et « sociétés » organiquement construits à partir d'entités réelles. Leur raison d'être réside dans le résultat qu'elles poursuivent. La sensibilité est déterminée par la façon dont elles se relient à leur environnement, par le biais de préhensions ou perceptions du soi.

La question de la sensibilité remet au premier plan la figure fragile du jongleur. Elle aussi évolue vers un état plus aléatoire. Elle s'étire et se rétrécit, s'éloigne et se rapproche au gré de l'effondrement de ses parties. C'est aussi une figure géométrique qui tourne sur elle-même. Plus elle tourne, plus les cercles de concepts qui s'effondrent deviennent instables, s'éloignant parfois les uns des autres et creusant la fracture spatio-temporelle avec la structure unique intégrée. Positivement parlant, la structure primordiale intégrée est l’unité du Néant et de l’Univers Quantique.

Tel le jongleur, l'Univers perd le contrôle de ses parties. Quelque chose en elles prend le dessus. Les divisions et les intervalles compliquent les choses. Chaque parcelle d'expérience s'enracine en elle-même. Mais si elles font partie d'un tout, ne devraient-elles pas savoir intuitivement au fond d'elles-mêmes ce que ressent l'Univers ? Il ne s'agit ni d'un regard extérieur ni d'une expérience intérieure mais que tout – à travers le soi, l'être, l'âme et l'entité – est manifestation du temps.

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Le temps, selon le soleil

Publié le par Catherine Toulsaly

Edward et Annie Maunder ont-ils lu le poème de Mallarmé lorsqu'ils ont entrepris de raconter l'histoire du cosmos ? Ont-ils remarqué la façon dont les mots dansent sur les feuilles de papier et comment ils s'étalent en groupes ou un par un comme des taches solaires à la surface du soleil ? Les observateurs, prisonniers de la croûte terrestre par la force de gravité , ne voient que la réalité qu'ils peuvent voir à la surface des choses : des étoiles scintillant sur le ciel de velours, des groupes de taches solaires dont l'ascension vers la surface reste invisible.

Ils perçoivent des schémas, des signes d'un processus caché et des indices de l'apparition de tempêtes. Ils observent des éruptions de taches solaires commençant dans les régions les plus éloignées en latitude et se déplaçant dans les deux hémisphères, plus près de l'équateur solaire. La zone de répartition de ces éruptions au cours d'un cycle solaire dessine une chronologie au graphique semblable à celle d'un papillon.

Ils remarquent les fluctuations de la symétrie des ailes. Lors du grand maximum solaire du siècle dernier, on observait une nette asymétrie nord-sud, avec un nombre significativement plus élevé d'éruptions dans l'hémisphère nord.

La tendance qui s'est inversée a montré des taches solaires qui se sont regroupées presque exclusivement dans l'hémisphère sud lors du dernier grand minimum et de celui de Maunder (1645-1710).

Les taches solaires apparaissent et disparaissent, du moins à la surface. Les zones plus calmes, entre des amas magnétiques plus puissants, agissent comme des régions de transition, comme si elles étaient reliées par un réseau souterrain. Les taches plus sombres sont grandes et petites, grandissent et rétrécissent, se fragmentent et fusionnent, rondes et allongées, de courte et longue durée, par paires ou en groupes. Des nuages ​​sombres avec des halos passent dans le ciel plasmatique. Et tout comme les nuages, ils changent de forme et s'évanouissent.

J'avais pensé écrire un article sur la façon dont le soleil demeure une constante dans nos vies. La nébuleuse de l'Aigle m'a rappelé sa présence intemporelle. Né de nuages ​​nébuleux et contracté en une boule de gaz, sa dynamique interne transparaît à travers des taches sombres, des plages faculaires, des granulations, des protubérances en forme de jet et des éruptions ascendantes. Sous la surface, sa texture granuleuse cache un mécanisme qui déclenche secrètement des conflagrations soudaines, comme si des volcans crachaient un excédent de plasma. Des ondes de pression qui montent et descendent le long des tunnels et des ponts créent une morphologie changeante.

Mais finalement, j'ai écrit sur les cycles du temps, sur la façon dont ils s'allongent, puis se brisent sous le poids de facteurs et de perturbateurs internes et externes. Les intervalles entre eux grandissent. Les cycles se perdent en variables. Ils ne sont qu'une approximation qui implique l'existence d'un faisceau de faits grossiers dont les détails fins se dessines au fil du temps. Tout système, qu'il s'agisse du soleil ou de l'Univers, évolue vers un état plus aléatoire. C'est ainsi que le soleil traverse des cycles de changement.

La cyclicité est une propriété plus facile à appréhender sur des échelles de temps plus courtes, moins lorsqu'il s'agit d'une période de plusieurs milliers à plusieurs milliards d'années dont le début et la fin sont difficiles à mesurer.

Le hasard, par l'apparition de motifs répétitifs, comme les taches solaires, remonte à la surface. Dans l'inversion du champ polaire et l'activité magnétique du soleil, nous trouvons des indicateurs et établissons des paramètres pour confirmer les prédictions d'un modèle cyclique, voire périodique.

Alors que les cycles solaires durent en moyenne 11 ans, un cycle vers 1601 dura cinq ans, et celui qui a suivi, 16. Au XVIIIe siècle, on comptait des cycles de 7 ou 8 ans, tandis que d'autres duraient 15 ans. L'hypothèse est que l'allongement de plusieurs cycles solaires voisins, dont au moins un dépasse de plusieurs années 11, pourrait être une condition préalable à la disparition durable des taches solaires. Cependant, alors que le cycle 23 a duré 12,7 ans, le cycle 24 est revenu à une durée normale de 11 ans.

Les minima solaires, qui durent quelques cycles, se caractérisent également par un plus grand nombre de jours sans taches. Le cycle 24 est le quatrième enregistré avec le moins de taches solaires. On a recensé 274 jours sans taches en 2019 (SILSO).

Cependant, une augmentation récente de l'activité solaire s'est produite pendant la phase ascendante du cycle solaire 25. La tendance s'est inversée, le nombre de jours sans taches ayant diminué en 2020 et 2021, passant respectivement à 192 et 50 (SILSO). Après un hiver solaire calme, le soleil est sorti de sa torpeur pour reprendre son activité de plus belle.

La sortie d'une brève période de minimum dépendra de la faiblesse du cycle 25 comparativement à celle du cycle 24. Son maximum est attendu entre février et mars 2024, et en cas de minimum séculaire, il pourrait perdurer jusqu'au cycle 26. Mais même ainsi, cela ne suffirait pas à contrer la tendance au réchauffement causée par les émissions de gaz à effet de serre, six fois supérieure au refroidissement possible sur plusieurs décennies dû à un grand minimum solaire prolongé.

Il y a mille deux cents ans, une grande tache solaire a été observée à l'œil nu le 16 mars 807, à l'époque de Charlemagne. Comme le rapportent les Annales Royales, elle a duré huit jours. Était-elle de la même taille, voire plus grande, que le grand groupe de taches solaires du nord repéré par Richard Carrington en 1859 ?

Lors de la grande tempête géomagnétique du 28 août au 3 septembre 1859, Carrington fut témoin de la séquence extrêmement puissante de deux zones de lumière blanche et intense, probablement plus puissante que la plus puissante éruption de rayons X enregistrée le 4 novembre 2003.

De grandes éruptions peuvent impacter directement la Terre selon l'endroit où elles se produisent à la surface du soleil. La reconnexion magnétique, par laquelle l'énergie stockée dans les champs magnétiques est convertie en énergie sous forme de particules chargées, est à la base de la formation des tempêtes géomagnétiques, potentiellement dommageables pour les satellites, les voyages spatiaux, les systèmes de communication terrestres et les réseaux électriques.

La biographie de Charlemagne décrit l'incendie d'une structure en bois et une torche éblouissante descendant du ciel serein. Ces détails sont-ils liés à une éjection de masse coronale atteignant la Terre ? On estime que les étoiles naines G comme le soleil pourraient produire des superéruptions toutes les quelques centaines à quelques milliers d'années.

Tout est connecté dans l'esprit du cosmos à la croissance des arbres. Nous sommes témoins de la présence de ce qui est, de ce qui s'est passé, de ce qui sera et de ce qui est toujours en mouvement. Les chercheurs qui étudient les cernes des arbres tentent de confirmer si l'enrichissement en radiocarbone d'origine cosmogénique peut laisser des empreintes digitales ponctuelles et cohérentes. Une étude a découvert une possible corrélation avec trois moments historiques de jets de particules solaires en 994, 1052 et 1279. Une autre a réalisé deux datations de radiocarbone en 774 et 993.

Une troisième suggère que le système solaire navigue à travers des nuages ​​interstellaires suffisamment épais pour réduire par quatre le champ magnétique de héliosphère, déjà diminué après les derniers cycles faibles. Lorsque l'activité solaire décline, les rayons cosmiques galactiques peuvent atteindre la Terre et provoquer une augmentation rapide du carbone 14 lors d'un minimum sur deux des cycles solaires.

Alors que nous envisageons la possibilité de cycles plus longs astronomiques, nous nous demandons finalement dans quelle mesure ils sont étroitement liés à ceux de la biosphère et de la vie humaine. Nous comprenons le temps à travers les complexités spatio-temporelles de cycles imbriqués (taches solaires, précession, rotation, cycles saisonniers, hydrologiques, carbone, azote, etc.). Pourtant, nous peinons encore à saisir la place deses êtres vivants dans l'Univers.

Au sein d'un système de cycles superposés, se cache la difficile question de la conscience. Nous ne pouvons pas confirmer la cyclicité systémique d'événements historiquement rares, mais seulement que là, sur Terre, dans cet Univers, naissent des âmes.

Concrètement, à la surface, l'Univers se révèle pas à pas et se connaît petit à petit. Sous la surface, il y a des connexions complexes entre les êtres et les mécanismes, tous dotés du pouvoir d'agir. Nous pensons que la naissance d'une âme est un phénomène fractal, tel les branches d'un arbre invisible, et qu'au-delà de la réponse géophysique et biochimique de la Terre à l'activité solaire, des signaux de résonance sont éclipsés par les trajectoires du flux UV, des particules énergétiques et de la matière plasmatique.

Imaginons que le soleil possède une volonté et le pouvoir de communiquer par l'intermédiaire de particules lumineuses. Ainsi, le caractère sonore du rayonnement solaire et le bruit des vagues sur sa surface tempétueuse sont captés haut et fort par radiofréquences sur de grandes distances dans les galaxies voisines, à l'autre bout de l'Univers. Mais même le soleil se place dans le cadre de structures temporelles universelles.

En janvier 2023, la Terre a tremblé fortement à douze reprises, par deux fois le 20 janvier et de nouveau en février avec un séisme de magnitude 7,8 en Turquie tandis qu'une vingtaine de volcans émettaient signaux thermiques, cendres et bouffées de vapeur.

Le soleil, lui aussi, a clairement indiqué qu'il n'était plus silencieux avec trois éruptions X (de faible intensité) et treize sursauts de magnitude moyenne. Face à ces faits concomitants, on se demande si la Terre tremble lorsque le soleil décharge des nuages ​​de poussière, ou si elle réagit par des larmes de lave aux vents solaires.

Au bout du compte, l'Univers est une métaphore de formes et de représentations visuelles. Les métaphores révèlent qu'à l'intérieur d'un cercle se trouve un soleil, et à l'intérieur d'une théorie, un univers sans forme. Lorsque le soleil s'est couché derrière la Freedom Tower, j'ai imaginé des étoiles se formant au sommet des gratte-ciels comme des piliers de gaz. Attiré au bord de l'abîme, aux portes de l'héliosphère, l'esprit perçoit que l'Univers est un fluide fractal de particules libres. Toutes les échelles sont relatives. Et lorsque j'entends le mot « invariant », c'est le mot « convergent » qui résonne dans ma tête. Sur le parcours visuel,  les hauteurs de gratte-ciels s'enfoncent dans des nébuleuses et les piliers qui s'élèvent sur la surface du soleil  projettent des flèches de plasma en direction de la Terre.

Un oiseau, à l'ombre, survole le robinier du voisin au soleil levant. La brise porte ses ailes. Il ne reste plus aucun nuage dans le ciel lorsqu'il revient plus tard. Un moineau domestique se perche sur la branche supérieure du jeune chêne devant ma fenêtre. Son chant me tire d'un brouillard mental. La nuit précédente, j'avais rêvé d'un éléphant qui charge et d'un ours colossal dormant sur un toit.

The elephant and the bear (Google-Labs-Image FX)

The elephant and the bear (Google-Labs-Image FX)

La nuit, rêver, c'est comme assister à un drame qui se déroule dans les recoins obscurs de l'esprit vers des horizons plus lumineux.

Le jour, des bruants chanteurs guident mes pas à travers la forêt enchantée de l'Univers, vers les longues branches latérales d'un arbre massif à l'écorce blanche, brillant au soleil.

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La forêt universelle

Publié le par Catherine Toulsaly

Visual Trail (Google-Labs-Image FX)

Visual Trail (Google-Labs-Image FX)

Un sentier visuel s'ouvre. Il passe à travers la lumière, les sons et l'eau, gravit les gratte-ciels et se fraie un chemin à travers les nuages ​​jusqu'au soleil.

C'est le même chemin qui commence à partir des concepts et s'étend jusqu'à l'univers physique. Une théorie de l'harmonie comble un abîme invisible. Un pont relie des principes de correspondance enchevêtrés, d'abord imaginés conceptuellement, puis de manière plus concrète.

Les idées, elles aussi, sont véhiculées par les couleurs de la lumière, les longueurs d'onde et les sons. Elles aussi surgissent d'un hôte et necessitun médium pour atteindre des récepteurs dont la localisation spatiotemporelle est intrinsèquement liée à un soi intérieur d'images passées et de souvenirs ancestraux. La raison et la logique ont-elles leur mot à dire, ou la liberté ouvre-t-elle la voie sous la surface des choses ?

Les Piliers de la Création ont été étudiés au fil du temps, nous offrant de nouvelles perspectives. Les instantanés pris depuis la toute première capture de ces structures par le télescope spatial Hubble en 1995 sont des fragments d'un paysage mouvant. Ils se situent dans M16, l'une des nébuleuses « à étoiles » répertoriées par Charles Messier dans son catalogue original de 1771, que Jean-Philippe Loys de Cheseaux a observée pour la première fois à partir d'une liste qu'il avait compilée en 1746. Messier a écrit que dans la nuit du 3 au 4 juin 1764, il a (re)découvert un amas de petites étoiles, qui est apparu sous la forme d'une nébuleuse.

L'Univers est constitué de prises de vues qui se déroulent au fur et à mesure que chaque information est transmise d'une à l'autre. Comme pour la formation des étoiles et des planètes par accrétion, à chaque étape, elles ajoutent de nouvelles caractéristiques qui s'intègrent mécaniquement. Que les nébuleuses apparaissent s'éloigner, ou que les astéroïdes fassent face à la Terre ou que les galaxies soient vues de profil, le traitement d'images tente de produire une vue unifiée, convertissant un ensemble de données composites en couleurs qui lui sont d'office attribuées.

Les piliers sont fréquents dans les régions formant des étoiles, notamment le Mont Mystique dans la nébuleuse de la Carène. Tels un jeu d'ombre et de lumière sur un visage, leurs panaches ondulés révèlent en infrarouge une morphologie complexe, des écoulements de gaz translucide, des étoiles enchâssées et une structure stratifiée. On suppose que leur existence transitoire dépend de l'explosion de supernovas et que leur forme est sujette à des changements jusqu'à leur rupture et leur effondrement.

Les Piliers de la création pourraient être aussi larges que la distance séparant le Soleil de l'étoile de Barnard, et le plus haut pourrait s'étendre entre nous et Proxima du Centaure. Leur durée de vie pourrait atteindre quelques millions d'années. Leurs têtes sont ionisées et photoévaporées par l'amas voisin NGC6611, ce qui donne aux nuages ​​l'apparence de queues de jument dans le ciel. Le premier pilier à gauche est constitué de deux entités distinctes. La partie supérieure s'étend derrière les étoiles ionisantes, avec des queues de globules cométaires en évaporation pointant vers nous. La partie inférieure se trouve devant elles, avec des queues pointées vers nous. Les piliers sont divisés en trois parties principales, la troisième forme étant indéterminée, comme un cheval sans nom.

Les Piliers de la création s'élèvent au cœur de la nébuleuse de l'Aigle, telles des stalagmites au fond d'une grotte. L'aigle aux ailes sombres plane au-dessus d'une crique isolée, nid de chaînes de nuages ​​ascendantes. Sa vue plongeante saisit les aspects physiques et spirituels des choses. Les piliers sont ancrés comme de manière etheresur une crête, attirant masse et énergie. Les plis limpides de gaz et de poussière sont dépouillés de leur substance par des étoiles affamées.

Sur le sentier visuel, les principes fondamentaux surgissent au gré des pensées qui s'enchaînent rapidement. Les poètes se lèvent tôt pour capter du regard le soleil. Ils écoutent les voix intérieures du passé, présent et  futur puis redescendent dans la lumière du soleil couchant. Ils racontent leurs rencontres avec les formes et contours de l'Univers. Un voyage dans l'espace ressemble à une promenade en forêt. Le jeu de lumière et d'ombre sur les arbres nourrit l'inspiration poétique.

Dans les sombres lieux boisés  de l'Univers, il y a des arbres dont les racines poussent sous la surface des choses. Les piliers sont de gigantesques vrilles de poussière cosmique qui rappellent aux poètes des branches d'arbres. Une fois que l'échelle des grandeurs devient absente de l'œil intérieur, les piliers deviennent des arbres en hiver, enveloppés de lianes nues, des corps filiformes reflétant la lumière dans l'antre de la nébuleuse, des figures sculpturales. La subtilité de toute chose réside dans l'effondrement de l'espace-temps, l'abolition de l'échelle.

Des colonnes brumeuses, débordantes d'activité, sont des êtres spirituels dont la présence subtile est perçue par les récepteurs terrestres. Nichées au creux des nébuleuses, elles se dressent telles de minces gratte-ciels new-yorkais, comme si elles faisaient partie d'un laboratoire d'architecture, d'une pépinière de création. Colonnes de gaz et gratte-ciels de béton ne font  qu'un, fusionnant dans un univers informe.

 

Gas pillars and concrete skyscrapers become one (Google-Labs-Image FX)

Gas pillars and concrete skyscrapers become one (Google-Labs-Image FX)

Les Piliers de la Création sont des châteaux de sable, échos assourdis qu’il n’y a pas d’agencement sans l'espace, de sensibilité sans le temps, ni de conscience sans la gravité. Ils révèlent la silhouette d'un ermite face à trois corps qui se chevauchent les uns sur les autres, tous posant la même question : « Pourquoi vivre et mourrir si ce n'est pour atteindre un but supérieur ? »

Robert Burnham Jr. a vu la silhouette de la reine des étoiles dans le contour du pilier central (de droite à gauche).

Dans mon esprit, je vois une alchimiste dans son atelier, travaillant sur l'action des processus physiques et spirituels, transformant le chaos et formant des étoiles. Elle tisse un réseau de connexions complexes au sein de structures architecturales en constante évolution, canalisant une essence intemporelle à travers l'espace-temps. Elle nourrit la genèse des choses et maintient un équilibre fragile, mêlant matière et énergie.

La reine des étoiles que je dessine est réalisée avec des perles de mon vieux collier, enfilées sur un fil. Elles forment une chaîne subtile d'anneaux en équilibre précaire, les uns sur les autres, comme un château de cartes, le château de toutes les choses. Elles forment une danseuse qui, j'imagine, pirouette autour d'un axe de boucles. L'information traverse les lignes. Les cercles se croisent.

Je n'ai qu'une intuition. Un coup de pouce dans cette direction.

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