Épochè

Publié le par Ysia

 

...j'opère l'épochè phénoménologique qui m'interdit absolument tout jugement portant sur l'existence spatio-temporelle. Par conséquent, toutes les sciences qui se rapportent à ce monde naturel (...) je les mets hors circuit, je ne fais absolument aucun usage de leur validité ; je ne fais mienne aucune des propositions qui y ressortissent, fussent-elles d'une évidence parfaite » (Husserl, Idées directrices pour une phénoménologie pure et une philosophie phénoménologique (1913), Gallimard, coll. "Tel", p. 101-103).

 

Lorsqu’un évènement pousse à suspendre tout jugement de réalité,et plonge dans l’incrédulité, que reste-t-il comme certitude? La conscience qui m’habite temporairement prendra refuge sous d’autres formes dans d’autres abris, imprégnée à chaque étape de la vie par la sagesse universelle. Dans la relation entre l’Univers et la conscience s’inscrivent les paroles de Sartre sur la Transcendance de l’ego :

 

Le Monde n’a pas créé le Moi, le Moi n’a pas créé le Monde, ce sont deux objets pour la conscience absolue, impersonnelle, et c’est par elle qu’ils se trouvent reliés. Cette conscience absolue, lorsqu’elle est purifiée du Je, n’a plus rien d’un sujet, ce n’est pas non plus une collection de représentations : elle est tout simplement une condition première et une source absolue d’existence. Et le rapport d’interdépendance qu’elle établit entre le Moi et le Monde suffit pour que le Moi apparaisse comme «en danger» devant le Monde, pour que le Moi (indirectement et par l’intermédiaire des états) tire du Monde tout son contenu (p. 86-87).

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L'éveil de la conscience

Publié le par Ysia

L'éveil de la conscience vacille au détour d’une erreur commise, dans l’ombre d’une illusion, un linceul d’incompréhension. L'éveil de la conscience passe par la traversée de l'abîme fantôme, du gouffre abyssal entre passé et avenir. Par le lâcher prise de chaînes surannées, il jaillit dans un amoncellement de connaissances, dépouillant les non-dits et les vérités cachées. L'éveil de la conscience sourd dans le vide de la Voie et se nourrit d’imagination, de poésie et de fantaisie. La conscience au sortir d’ une crise s'abandonne à elle-même, mise à nue par le passage du temps.  À la conquête des abîmes fantômes, de l'espace entre matière et antimatière, que disent philosophes et poètes?

 

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Le pardon de soi

Publié le par Ysia

La vie n’est pas un fleuve tranquille qui commence en amont et termine dans l'océan de l'outre monde. Elle se perd dans les méandres et crée des lacs fabuleux, des cascades gigantesques et irrigue la terre

La vie n’est pas un fleuve tranquille

 

Au centre de l’espace triangulaire du monde, de la chair et du diable, l’évolution spirituelle est un concept que l’humanité individuellement ou collectivement tend à ignorer. Sur le long fleuve d’une vie, comment devenir un être meilleur que l’on a été envers soi et envers les autres? Comment dépasser ses propres limites tracées par des démons intérieurs ?Résonance ou vanité a été pour moi la traversée d’un océan spirituel. Je n’ai toujours pas amarré mon radeau de fortune sur la rive d'un havre de paix. Avant de pouvoir atteindre l'autre rive, il y a, dit-on, vingt choses difficiles ici-bas. Je m’étonne que le pardon de soi ne soit pas inclus parmi elles. Comment pardonner à soi-même? Je ne sais pas. Ce que je sais, c'est que sans se pardonner, comment peut-on pardonner aux autres? Treize mois ont passé. Il me semble aujourd'hui que se pardonner, c'est accepter ce qu'on ne peut changer, y compris soi-même.

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Le flot des ondes

Publié le par Ysia

 

La conscience universelle s'élargit comme un fleuve engorgé des consciences individuelles, en amont duquel paroles et écrits sont jetés dans le courant, que ratrappent au passage philosophes et physiciens du temps présent. La voie est le flot de l’espace invisible,  le mouvement qui a précédé l'émergence des choses, l’espace vide qui contient une immense énergie. Et dans le flot de l’espace et du temps circulent les ondes qui viennent se jeter sur les rives de la Terre,  les ondes qui oscillent dans le vent imperceptible lancées par le soleil à l’assaut de l'héliosphère, les ondes qui gardent l'entrée de la forteresse magnétique de la Terre et les ondes gravitationnelles comme des cercles sur la surface de l’eau. II y a le flot des choses et les choses qui composent ce flot. La conscience est un fleuve dans lequel l’univers répand des ondes de lumière et de son entrelacé(e)s.  

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Concepts

Publié le par Ysia

Le problème avec la conscience est notre incapacité, dans l’état actuel de nos connaissances, de pouvoir indubitablement et totalement tester ses propriétés et son champ d’activité en dépit des recherches innovatrices entamées sur plusieurs fronts notamment par Gregory Matloff, Franco Vazza,  Francesco Izzo et bien d’autres.

Christopher Tyler affirme que ce que l’on nomme probabilité en mécanique quantique ne concerne pas une situation physique mais un concept opérationnel formé par un esprit conscient,  une représentation philosophique distincte d’une énergie physique et qu’en tant que telle elle a la capacité de se manifester dans la réalité sous le regard de celui qui l’observe à moins qu’elle demeure non corroborée et par là même insubstantielle. En tant que telle, elle obéit au principe de superposition des états et de leur effondrement.  Toute probabilité est une potentialité dans les faits ou dans la matière déterminée par l’observateur individuel ou par consensus. Si c’est le sens commun qui prime au-delà de la subjectivité individuelle, il ne s’agit pas de la constatation objective d’une conscience individuelle ou collective mais de conventions établies et d’aprioris. Bien que l’acte de conscience se vive individuellement, c’est dans la conscience collective qu’elle puise son ressenti. Il appartient de mesurer objectivement la portée de la conscience individuelle et sa relation avec une hypothétique conscience universelle.

S’il est simple de parler en termes généraux du système unitaire qu’est l’univers, c’est dans les détails, dans la complexité des interactions compartimentées dans une infinité de structures et à des niveaux spatio-temporels  illimités que se situe la difficulté de son observation. Le poète se sert de la clarté des mots et du langage des images comme bâton de pèlerin dans sa prise de conscience. L’expansion de l’univers est concomitante à l’accroissement de sa  complexité. La complexité des systèmes écologiques et du processus d’évolution des espèces participe de l’entrecroisement de réseaux de communautés d’espèces variées qui tendent à l’instabilité. L’être vivant est lui-même un système hautement structuré qui se maintient et se reproduit  par le biais d’une pléthore d’activités visant à l’auto-organisation, propriété innée des systèmes complexes. En 1991, Stuart Kauffman écrivait qu’il n’y avait pas de consensus quant à la définition de la complexité.  Pourtant quand on parle d’incompressible complexité, il me semble que c’est du passé dont il s’agit et de la construction évolutive du futur.

Quand on parle de la complexité biologique au bord du chaos, cela signifie que le chaos fait partie intégrante du comportement des systèmes complexes. Entre chaos et antichaos, le processus de complexification engendre des états critiques desquels surgissent des processus de renormalisation caractérisés par des aspects simples et réductifs dans des cadres spatio-temporels en mouvement. Du fait d’un principe d’universalité en mécanique statistique, des systèmes très différents qui partagent certaines caractéristiques fondamentales se comportent de la même façon lorsqu’ils sont proches de la zone critique de transition. La criticalité/criticité auto-organisée caractérise les systèmes complexes, formés de nombreux éléments en interaction, qui évoluent vers le seuil critique. De ces systèmes complexes émerge une dynamique nouvelle qui ne découle pas nécessairement des propriétés de leurs éléments constitutifs. Une conséquence particulièrement importante du point critique est le découplage entre processus micro- et macro-évolutionnaires.

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Élection historique

Publié le par Ysia

En ce mois de novembre dédié chaque année depuis 1990 à la célébration de  l’héritage et du patrimoine du peuple amérindien, une étape importante vient d’être franchie.  Parmi plus de cent femmes élues membres du nouveau Congrès, deux Amérindiennes ont remporté une victoire historique mardi dernier. Dans le contexte actuel de suppression de droit de vote des minorités, en particulier des Amérindiens,  et de l’impact de la construction du mur frontalier sur les familles amérindiennes qui vivent des deux côtés,   Deb Haaland de la tribu Laguna représentera pour la première fois l’état du Nouveau-Mexique qui n’accorda la citoyenneté aux Amérindiens qu’en 1924 et le droit de vote qu’en 1948.

Deux Musulmanes ont également remporté une victoire historique avec leur élection au Congrès. En succédant à l’imposante figure noire américaine John Conyers, Rashida Tlaib d’origine palestinienne devient la représentante du 13ème district congressionnel du Michigan, le troisième plus pauvre du pays.

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Prélude dans la prison cosmique

Publié le par Ysia

L’écriture est un cheminement irrépressible et fragmenté dont la finalité est un mystère. Au cœur de la prison cosmique évolue la Terre autour du Soleil, peuplée de milliards d’êtres et de leur moi intérieur. A chaque instant, le moi s’agite et se déguise sous un habit social ou conceptuel, primitif ou narratif, autobiographique ou écologique.  Le soi individuel est intrinsèquement lié au corps, peu importe les masques qu’il porte en société, avec l’autre ou avec lui-même dans l’espace-temps, emprisonné. Je ne suis pas sûre qu’il faille étiqueter le soi.  Ce que je sais, c’est que, dissocié de mon être profond, mon moi rationnel apparaît tour à tour avec mon moi émotionnel dans une valse étourdissante et rarement avec mon moi spirituel qui recherche en arrière-plan les fils d’une vérité que mes mains ne peuvent rattraper jusqu’au bout du chemin… Ce que je sais, c’est que le soi se dépersonnalise pour se reconstruire à chaque étape d’une évolution personnelle irréversible lors de laquelle il redéfinit ses croyances et concepts dans une quête perpétuelle  d’ordre au bord du chaos, d’une nouvelle autoreprésentation de lui-même.

Il me semble qu’une structure fractale a pour raison d’être la libre circulation de l’information et s’il faut considérer l’univers comme un tout, habité d’étoiles moléculaires, peut-on parler de la conscience comme d’une forme d’énergie apte à se structurer en une série de niveaux auto-organisés dont les principes opérationnels ne découlent pas des niveaux précédents mais émerge de la criticalité/criticité auto-organisée de structures indépendantes de l’échelle universelle ?

Les fractales, phénomènes qui présentent une invariance d’échelle, sont nommées autosimilaires, c’est-à-dire qu’une modification dans l’échelle de mesure n’a aucun impact sur le comportement statistique observé. L’autosimilarité est une caractéristique essentielle de l’état critique.  En physique, les structures fractales émergent au voisinage de certaines phases de transition ponctuelles. Parce que les fractales impliquent des corrélations sur le long terme, elles reflètent fondamentalement comment les organismes vivants s’organisent et comment ils évoluent dans le temps.  Les structures autosimilaires existent à des niveaux divers en biologie et se manifestent aussi sous la forme de séries temporelles telles que les battements du cœur. La conscience, fractale temporelle, fait écho aux battements du cœur. L’univers s’adapte à la complexité de l’espace-temps et tend alternativement vers l’ordre et le chaos dans un cycle ouvert ou fermé.

La physiologie fractale, qui décrit des phénomènes de la vie organique, s’applique-t-elle aussi bien à la constitution des êtres vivants qu’à l’architecture moléculaire des étoiles froides de l’univers ? Le tissu moléculaire d’une étoile donne la preuve de l’émergence de structures auto-organisées et dépendantes de l’échelle considérée. S’il faut parler d’une conscience à l’échelle stellaire ou à l’échelle humaine, étudier comment le flux d’information traverse l’espace et le temps qu’il s’agisse de trous noirs, de jeunes étoiles de la Voie Lactée, des réseaux galactiques ou des réseaux neuronaux est la voie à suivre. Le poète, qui franchit le seuil de territoires inexplorés, tâtonne et trébuche et se laisse à rêver impatient que c’est à la frontière entre la physique quantique et la physique classique que voyage la conscience en apparence freinée dans ses mouvements à chaque échelon de l’échelle de grandeur et c’est par l’effondrement à l’échelle de Planck des espaces-temps superposés qu’elle se hisse d’un niveau à l’autre.

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Le panpsychisme peut-il devenir une science observationnelle ?

Publié le par Ysia

C’est le titre d’une étude publiée en août 2016 dont l’auteur est Gregory L. Matloff du département de physique du Collège de technologie de la ville de New York.  A la suite des travaux sur la conscience quantique réalisés par Evan Harris Walker, Gregory Matloff voulait examiner les théories d’Olaf Stapeldon, auteur de Star Maker, selon lesquelles l’univers est conscient et les mouvements des étoiles sont en partie « intentionnels ».

La conscience telle qu’elle se manifeste à travers les synapses neuronales s’expliquerait dans le cadre de la mécanique quantique au niveau des microtubules. La question demeure : L’absence de synapses et neurones exclut-elle toute autre forme de conscience ? Ou la conscience se joue-t-elle à un autre niveau, peut-être moléculaire ?

L’évolution décrit une représentation à  long terme du temps,  un tableau macroscopique de l’univers dans le cadre duquel la biologie, par son étude de la croissance dans l’espace de toute forme de vie, offre un regard microscopique du monde.

Il y a deux systèmes de pensée : l’un est l’épiphénoménisme qui soutient que les pensées et l’activité mentale sont dues à des propriétés physiques. La conscience émergerait chez les êtres humains et les animaux d’intelligence supérieure de par la complexité des réseaux neuronaux. L’autre est le panpsychisme qu’ont décrit David Chalmers et Thomas Nagel. Freeman Dyson notamment a imaginé trois niveaux de conscience : au niveau quantique des particules élémentaires, au niveau humain et au niveau cosmologique. C’est sur ce dernier niveau que Gregory Matloff a concentré ses efforts avec sa théorie d’une conscience stellaire. Il n’est pas absurde, déclare-t-il,  que des fluctuations quantiques du vide puissent jouer un rôle dans le phénomène de la conscience au niveau stellaire voire universel.

Il s’est attaché dans un premier temps à déterminer quelles étoiles se composent de molécules et à quel niveau ces molécules se situent. Sur la base des diagrammes de Hertzsprung-Russell et de l’indice de couleur B-V, les étoiles sont classées par ordre de luminosité et en fonction de leur température avec, parmi les plus intenses, les supergéantes, les géantes, les naines de la séquence principale et les naines blanches.

L’anomalie constatée dans la vitesse de mouvement de certaines étoiles éloignées du centre galactique qui circulent plus rapidement que celles plus proches du centre a attiré l’attention des chercheurs. La différence de vitesse que l’on appelle la discontinuité de Parenago se reflète dans la distribution thermique stellaire. Une raison avancée serait la présence de la matière noire. Mais ni les objets compacts et sombres dans le halo galactique (MACHO) ni les particules massives interagissant faiblement (WIMPS) ne sont des hypothèses viables  selon Matloff qui  leur préfère une nouvelle théorie : une conscience qui se manifesterait au niveau moléculaire grâce à l’effet Casimir dû aux fluctuations quantiques du vide, ce qui expliquerait la discontinuité de Parenago.

Des molécules stables se situent au-dessus de la photosphère et en-dessous de la chromosphère. L’hypothèse avancée à l’origine par Erich Jantsch a été confirmée avec la détection de molécules dans les couches supérieures des étoiles dites froides. Gregory Matloff propose que la différence de vélocité de mouvement entre les étoiles froides composées de molécules et les étoiles chaudes qui en sont dépourvues est liée à la biologie moléculaire de l’accès à la conscience et à l’intentionnalité démontrée par les étoiles qui possèdent des molécules. On a détecté  des molécules en étudiant le spectre du soleil, une étoile naine, et ses taches. Des molécules simples se trouvent aussi dans les étoiles de type spectral G et K,  les étoiles moins chaudes ayant une signature moléculaire plus complexe.

Les étoiles n’ont ni neurones ni tubules mais on a observé que certaines étoiles jeunes  émettent un jet matériel stellaire unidirectionnel ou unipolaire durant les premiers milliards d’années de vie. Grâce aux moyens dont dispose ESA, l’Agence spatiale européenne notamment, avec le satellite Hipparcos, la première mission européenne à avoir identifié plus de 100 000 étoiles, et son successeur Gaia lancé en 2013 pour déterminer la position de plus d’un milliard d’étoiles dans la Voie Lactée, qui sera en mesure de tracer une carte tridimensionnelle de notre galaxie, on attend de pouvoir établir que ce comportement est lié à la température et à la distance du centre galactique. Avec Gaia, il sera possible après avoir passé en revue les données reçues de vérifier si la discontinuité de Parenago est un phénomène qui s’applique à l’ensemble de la galaxie. Les télescopes sur terre ou dans l’espace seront également à même de détecter ce phénomène dans les autres galaxies.

Des questions restent donc en suspens : Y a-t-il une corrélation entre la distance d’une jeune étoile au centre galactique et son intensité et/ou sa direction ? Quelle est la durée de ce jet matériel ? Pourra-t-on confirmer la détection de molécules dans les étoiles plus froides que celles de type spectral F8 ?

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Réalité et vérité

Publié le par Ysia

Let me ride the dragon of my dreams to the end of time until my sanity disappears

Une frontière intangible sépare la réalité de la vérité. C’est dans un processus long et complexe qui conduit à la découverte de réalités nouvelles qu’un dialogue de sourds oppose vérités et contre-vérités. Et c’est sur ce terrain mouvant que s’aventurent les dompteurs de l’imaginaire.

Langage immatériel, poésie innée. La ronde des mots fait écho aux mouvements de danse et de musique, qu’inspire la nature dans une communion des êtres. Ce que l'on appelle la musique ou la production d’un ensemble de sons plus ou moins sophistiqués agit comme un écran sur lequel chacun projette le film de ses émotions, déclic d’un langage intérieur. 

La clef des mots ouvre la serrure des pensées et des perceptions. Mark Vernon allègue que l’origine du langage ne saurait être ni utilitaire ni matérialiste et que les mots ont une âme parce que la nature en est elle aussi dotée.

Sur la question des mots qui se bousculent dans l’enclos de l’esprit,  Philip Jaekl nous informe que des études sont en cours : des chercheurs scannent les régions du cerveau qui seraient liées à notre petite voix intérieure ; d’autres étudient les liens entre dialogue intérieur et expression orale. D’après Lev Vygotski (1896-1934), ce dialogue intérieur est la prolongation naturelle du monologue dans lequel s’engage l’enfant entre 2 et 8 ans et avant lequel  il n’y avait ni mémoire, ni voix intérieure. Grâce aux procédés d’échantillonnage de l’expérience individuelle développés par Russell Hurlburt, il transparaît qu’une communication intérieure prend place en moyenne un quart du temps sous une forme soit sensorielle, auditive, visuelle, émotionnelle ou même d’une manière insensible et imperceptible, comme si l’internalisation du dialogue se faisait à différents niveaux physiques et mentaux.

 Il apparaît aussi que voix intérieure et expression orale entrent en concurrence dans la conquête de notre attention. Et le poète de demander : Si nous sommes des holobiontes sur un plan écologique ou évolutionnaire,  une accumulation de cellules,  bactéries, gènes et particules élémentaires, à quel niveau rôde la conscience ?

Si les neurones meurent cinq minutes après que  le cœur se soit arrêté, la conscience individuelle s’échappe-t-elle pour retourner dans le giron de la conscience universelle dans une enveloppe quantique restituée ? Les trajectoires de milliards et milliards d’atomes dans le cerveau forment une tapisserie dédaléenne, dont les fils entrelacés du temps et de l’espace représentent la collecte et le traitement des données desquelles surgit et se nourrit la conscience individuelle.

L’astrophysicien Franco Vazza et le neuroscientifique Francesco Izzo ont tenté une étude comparative entre réseaux galactiques et réseaux neuronaux sur la base de simulations numériques, des données collectées à l’aide de télescopes et de microscopes électroniques ainsi que des techniques telles que l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle et l’immunohistochimie. Les résultats préliminaires tendent à montrer que le réseau neuronal humain et la toile cosmique des galaxies sont du point de vue de la théorie d’information remarquablement similaires. Les deux chercheurs ont constaté que le nombre total de neurones  dans le cerveau humain est approximativement  le même que celui des galaxies de l’univers observable. Une analyse statistique a montré des similarités quantitatives entre la distribution de la matière dans le cosmos et la distribution des corps neuronaux dans le cervelet. Les variations structurales présentent une distribution comparable. La morphologie du cortex est aussi similaire à celle des galaxies. Toutefois les réseaux complexes du cosmos et du cerveau humain ne ressemblent pas à des constructions fractales à l’image des branches d’un arbre mais s’auto-organisent dans les limites imposées par leurs échelles de grandeur respectives.

Mais si réseaux galactiques et réseaux neuronaux n’ont pas un comportement fractal,  est-il correct d’affirmer que la conscience est une fractale temporelle ?

On attend de pouvoir créer un modèle qui permettra d’observer comment le flux d’information traverse l’espace et le temps dans les deux systèmes. Mais le temps est-il fondamental dans l’agencement de l’univers ou n’est-il qu’une propriété physique sans signification à l’échelle de Planck, qu’il sera un jour possible de débusquer ?

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La Nature du temps

Publié le par Ysia

Un sentiment étrange m’envahit dans un aéroport comme si le temps était suspendu et quand je voyage d’une ville à l’autre, mon corps et mon esprit semblent désarçonnés comme s’ils cherchaient à s’ajuster à une autre réalité, un autre univers, un autre espace-temps. Portland par son non-conformisme, ses coopératives de crédit, ses cinémas à un prix modique et ses films indépendants jusque dans l’aéroport me semble aussi, subjectivement, un lieu où le temps s’est figé.

Carlo Rovelli est un chercheur éminent dont le domaine de compétence est la gravité quantique. Il tente présentement de calculer la durée du rebond d’un trou noir. Poète, il déclare que la poésie est peut-être l’une des racines profondes de la science car elle aide à voir au-delà du visible.

Pour lui, l’univers s’articule en une infinité de processus en mouvement qui convertissent des quantités physiques dont il devient possible de calculer les probabilités et de déterminer les relations entre elles (p.195).  Dans son livre intitulé The order of time et paru en 2018 (Riverhead books), il explique que l’univers est pareil à une superposition de strates qui s’influencent et se chevauchent l’une l’autre. Chacune des parties de cet univers interagit avec une petite portion de toutes les variables dont la valeur détermine l’état de l’univers quant à ce sous-système particulier (p. 155).  Les physiciens appellent « champs » les fils du tissu de la réalité physique universelle. Il y a le champ électromagnétique de quoi est fait la lumière. Il y a le champ gravitationnel, texture du temps et de l’espace, sur lequel  s’imprime l’univers. L’espace-temps est ce champ gravitationnel qui fléchit, s’étire. Distendu, le champ spatio-temporel est une entité dynamique et concrète mais surtout dépendante du reste,  dans laquelle les distances s’allongent ou se contractent comme un ruban élastique. Le temps complexe et multicouche, qui tisse la toile d’une géométrie complexe entremêlée à celle de l’espace, forme le lien entre conscience et univers. Le temps qui est la forme sous laquelle nous interagissons avec l’univers est la source de notre identité (pp.197-198).

Akim Farrow, Reed College, Portland

Akim Farrow, Reed College, Portland

Carlo Rovelli énonce les caractéristiques de l’espace-temps : Il y a la granularité qui se manifeste dans les particules de lumière, dans l’air et la matière la plus dense sous la forme de particules élémentaires, de photons ou de quanta du champ gravitationnel à l’échelle de Planck. Il y a l’indétermination. Comme un électron  qui apparaîtrait à un point ou à un autre sans position précise, le champ spatio-temporel est un quadrillage invisible formé d’espaces temporels dans lesquels ni le passé ni le présent ni le futur ne constituent des compartiments cloisonnés, c’est-à-dire qu’il n’y a pas de définition universelle du fait de l’évolution constante de la relation entre les évènements qui surviennent.  Chaque objet ou fait dépend du cadre temporel et spatial  imprévisible, ni directionnel ni linéaire,  dans lequel il est observé.  Et c’est de cette imprévisibilité que découlent les probabilités de la relation étroite entre l’espace-temps et les objets physiques sous la forme desquels il interagit (p.89). L’espace et le temps sont les approximations d’une dynamique quantique (pp.127-128). A un niveau fondamental, l’univers est composé d’un assemblage de faits relativement  ordonnés dans le temps qui révèlent la relation avec des variables physiques. C’est ce frottement irrésistible qui provoque les évènements dans l’univers et écrit l’Histoire.

L’évolution du cosmos suit un processus de désordre. L’univers dans son ensemble est pareil à une montagne qui s’effondre au ralenti, comme une structure qui s’émiette graduellement. Pour que le passé laisse des traces, il faut que quelque chose s’arrête, s’immobilise dans son mouvement, dans une perte irréversible d’énergie, une baisse d’entropie. Temps et énergie sont interdépendants. L’énergie gouverne l’évolution temporelle d’un système.  Carlo Rovelli explique que l’entropie quantifie notre incertitude et  n’est rien d’autre que la somme des états microscopiques que notre vision embrumée et  notre perception imparfaite ne peuvent discriminer (p.34).

Mais le mystère de la relation entre deux évènements, l’un passé l’autre futur est-il le fait de notre incapacité à le démêler dans les présentes limites de nos connaissances ? Ce que nous commençons à comprendre, c’est que notre cerveau opère sur la base d’un ensemble de traces laissées par le passé sur les synapses, lieu de jonction entre nos neurones,  qui se forment à l’infini et se défont, laissant derrière elles une vague réflexion de ce qui a causé une empreinte par le passé sur notre système nerveux. Notre cerveau est une machine à remonter le temps parce qu’il se  souvient du passé pour prédire l’avenir, le mesure,  perçoit son passage et voyage dans le temps (Dean Buonomano, Your brain is a time machine, Norton & Company, 2017). L’existence de l’espace-temps définit « quelque chose » qui nous semble à la fois évasif et capricieux et qui existe au-delà de notre propre entendement. Le temps n’est ni unique ni absolu. Il se manifeste dans la mutation des êtres animés et inanimés. Parler du « quand » et du « où » implique nécessairement une relation avec le « quoi » (Carlo Rovelli, p.76-77). C’est  par l’extension de ses effets que nous mesurons le temps écoulé. Le temps et l’espace ne sont pas des phénomènes illusoires mais ils sont relatifs. Selon Einstein, on a tous été en proie aux doutes quant à la réalité de ce que nous avons vécu. Le cerveau s’applique à ranger conceptuellement les expériences dans les archives de sa mémoire en dissociant les souvenirs passés des expériences vécues dans le présent.

La Nature du temps
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