Ontologie quantique

Publié le par Catherine Toulsaly

De temps à  autre, je prends la mesure du chemin parcouru. J’ai l’impression que toutes les pièces du puzzle sont éparpillées. D’un côté, étudier le sujet sous tous les angles est un processus d’apprentissage qui permet l’émergence d’idées. De l’autre, plus le champ d’investigation est large, plus il devient difficile de tendre ses bras « mentaux » pour saisir les pièces manquantes et les rassembler.

Tout au long du chemin, je m’accroche à un fil invisible de mots et de concepts. En tant qu’apprenant visuel, je pense en images et vois dans les idéogrammes chinois une succession non seulement des formes intégrées dans la communication humaine mais surtout une géométrie originelle.

D’une manière ou d’une autre, « quelque chose » d’où naît l'être décrit l'emergence d'une existence accidentelle, un état d’incertitude qui se cherche. Dans l’image révélatrice d’une bataille pour un domaine, le temps affirme sa souveraineté. Cela fait allusion à un processus sous-jacent d’appropriation de ce qui n’est que potentiel. Je le lie à l’état quantique.

En fin de compte, la physique moderne n’a pas pour but d’expliquer tout. Son objectif est plus pratique : reproduire le monde physique et exploiter les propriétés quantiques des systèmes physiques. Les fluctuations quantiques conduisent à « l’être ». Des bits aux qubits, les ordinateurs ouvrent un passage entre l’abstraction et la réalité, mais lorsque nous passons des ondes lumineuses aux photons, aux phonons et aux ions, sommes-nous plus près de répondre aux questions philosophiques ?

Nous n’avons peut-être pas accès à  l’Univers en tant que cadre d’un nombre infini d’états superposés émergeant de façon semblant aléatoire, mais nous pouvons certainement reproduire les processus que nous observons, mesurons et dont nous faisons l'expérience.

Un système informatique quantique pourrait permettre une communication cryptée de manière sécurisée, un transfert de données beaucoup plus rapide et des capacités de stockage physique moins lourdes. Le CERN, dont les besoins informatiques augmentent rapidement, utilise l’informatique quantique basée sur le cloud d’IBM Quantum pour analyser 1 pétaoctet de données par seconde dans le Grand collisionneur de hadrons, ce qui nécessiterait 1 million de cœurs de processeur classiques.

L’intrication quantique est essentielle pour transmettre des informations sur de longues distances, avant la mise en place d’un réseau Internet quantique à grande échelle. Pour limiter les interférences, les turbulences et le bruit de fond, les communications quantiques par satellite bénéficient d’une orbite dans le vide spatial pour générer des clés symétriques et les transmettre simultanément afin d’établir un lien direct entre des utilisateurs séparés par de longues distances.

Contournant le besoin de répéteurs quantiques, deux chaînes de paires de photons intriqués ont été distribuées depuis le satellite Mozi 墨子 — l’un des cinq satellites expérimentaux scientifiques établis par l’Académie chinoise des sciences — vers deux observatoires terrestres distants de plus de 1 120 kilomètres. Des échanges de clés sécurisés intercontinentaux et le lancement de satellites en orbite plus lointaine sont en préparation. La course à l’espace quantique est lancée avec le programme National Space Quantum Laboratory, un partenariat entre la NASA et le Lincoln Laboratory du MIT.

Sans parler des implications stratégiques dans les secteurs du renseignement, de la sécurité et de la défense, ces premiers succès ont alimenté une course technologique dans le domaine de l’optique et de l’information quantique. Après que l’ordinateur Honeywell a été présenté il y a un an comme l’ordinateur quantique le plus performant au monde, une équipe de scientifiques chinois a annoncé en décembre avoir également réussi à développer l’ordinateur quantique le plus puissant du monde, Jiuzhang 九章, en effectuant en 200 secondes un calcul qui, sur un supercalculateur ordinaire, prendrait 2,5 milliards d’années.

La période de transition entre l’informatique classique et l’informatique quantique a une durée indéterminée. L’objectif n’est pas de remplacer l’Internet tel que nous le connaissons, mais de trouver une solution hybride. Les chercheurs à l'université de Duke développent actuellement ce qu’ils espèrent être le premier ordinateur quantique pratique et extensible basé sur la technologie de piéges à ions.

Mais pour la plupart d’entre nous, le Cloud constitue la seule avenue disponible pour accéder à un ordinateur quantique. Malgré les problèmes de sensibilité de la première génération d’ordinateurs quantiques aux interférences, au bruit et aux effets environnementaux, une approche coordonnée face à ces flux irréguliers, complexes et dynamiques de particules – porteurs d’informations quantiques – est en cours.

Les industries, les institutions bancaires, les décideurs politiques, les instituts universitaires et les agences spatiales font leurs propres recherches, tirant parti des nouvelles possibilités technologiques notamment pour effectuer des prévisions financières et des simulations chimiques, pour développer une technologie de détection quantique dans le cadre de l’astronomie multi-messagers et pour concevoir des moyens d’éliminer le dioxyde de carbone de l’air alors que les émissions de gaz à effet de serre atteignent des niveaux historiques.

Le concept d’ontologie quantique pourrait définir ce « quelque chose » censé s’auto-organiser et se localiser dans le temps et l’espace. Peut-être que les futurs systèmes informatiques quantiques contribueront à établir une représentation plus fidèle de l’Univers. Mais ce qui se passe actuellement avec la convergence des bits, des neurones et des qubits est l'aspect le plus fondamental.

The convergence of bits, neurons and qubits (Google-Labs-Image FX)

Une équipe de recherche aurait démontré que des algorithmes basés sur des réseaux neuronaux peuvent être appliqués à mieux comprendre le monde de la physique quantique. L’article de David Chalmers et Kelvin McQueen sur la conscience et l’effondrement de la fonction d’onde rappelle la possibilité qu’une résonance des entités micro-conscientes aux entités macro-conscientes ne puisse se produire que par intermittence lors de l’effondrement de la fonction d’onde, signalant le transfert d’informations et/ou d'un état de conscience.

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