Réalité et vérité

Publié le par Ysia

Let me ride the dragon of my dreams to the end of time until my sanity disappears

Une frontière intangible sépare la réalité de la vérité. C’est dans un processus long et complexe qui conduit à la découverte de réalités nouvelles qu’un dialogue de sourds oppose vérités et contre-vérités. Et c’est sur ce terrain mouvant que s’aventurent les dompteurs de l’imaginaire.

Langage immatériel, poésie innée. La ronde des mots fait écho aux mouvements de danse et de musique, qu’inspire la nature dans une communion des êtres. Ce que l'on appelle la musique ou la production d’un ensemble de sons plus ou moins sophistiqués agit comme un écran sur lequel chacun projette le film de ses émotions, déclic d’un langage intérieur. 

La clef des mots ouvre la serrure des pensées et des perceptions. Mark Vernon allègue que l’origine du langage ne saurait être ni utilitaire ni matérialiste et que les mots ont une âme parce que la nature en est elle aussi dotée.

Sur la question des mots qui se bousculent dans l’enclos de l’esprit,  Philip Jaekl nous informe que des études sont en cours : des chercheurs scannent les régions du cerveau qui seraient liées à notre petite voix intérieure ; d’autres étudient les liens entre dialogue intérieur et expression orale. D’après Lev Vygotski (1896-1934), ce dialogue intérieur est la prolongation naturelle du monologue dans lequel s’engage l’enfant entre 2 et 8 ans et avant lequel  il n’y avait ni mémoire, ni voix intérieure. Grâce aux procédés d’échantillonnage de l’expérience individuelle développés par Russell Hurlburt, il transparaît qu’une communication intérieure prend place en moyenne un quart du temps sous une forme soit sensorielle, auditive, visuelle, émotionnelle ou même d’une manière insensible et imperceptible, comme si l’internalisation du dialogue se faisait à différents niveaux physiques et mentaux.

 Il apparaît aussi que voix intérieure et expression orale entrent en concurrence dans la conquête de notre attention. Et le poète de demander : Si nous sommes des holobiontes sur un plan écologique ou évolutionnaire,  une accumulation de cellules,  bactéries, gènes et particules élémentaires, à quel niveau rôde la conscience ?

Si les neurones meurent cinq minutes après que  le cœur se soit arrêté, la conscience individuelle s’échappe-t-elle pour retourner dans le giron de la conscience universelle dans une enveloppe quantique restituée ? Les trajectoires de milliards et milliards d’atomes dans le cerveau forment une tapisserie dédaléenne, dont les fils entrelacés du temps et de l’espace représentent la collecte et le traitement des données desquelles surgit et se nourrit la conscience individuelle.

L’astrophysicien Franco Vazza et le neuroscientifique Francesco Izzo ont tenté une étude comparative entre réseaux galactiques et réseaux neuronaux sur la base de simulations numériques, des données collectées à l’aide de télescopes et de microscopes électroniques ainsi que des techniques telles que l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle et l’immunohistochimie. Les résultats préliminaires tendent à montrer que le réseau neuronal humain et la toile cosmique des galaxies sont du point de vue de la théorie d’information remarquablement similaires. Les deux chercheurs ont constaté que le nombre total de neurones  dans le cerveau humain est approximativement  le même que celui des galaxies de l’univers observable. Une analyse statistique a montré des similarités quantitatives entre la distribution de la matière dans le cosmos et la distribution des corps neuronaux dans le cervelet. Les variations structurales présentent une distribution comparable. La morphologie du cortex est aussi similaire à celle des galaxies. Toutefois les réseaux complexes du cosmos et du cerveau humain ne ressemblent pas à des constructions fractales à l’image des branches d’un arbre mais s’auto-organisent dans les limites imposées par leurs échelles de grandeur respectives.

Mais si réseaux galactiques et réseaux neuronaux n’ont pas un comportement fractal,  est-il correct d’affirmer que la conscience est une fractale temporelle ?

On attend de pouvoir créer un modèle qui permettra d’observer comment le flux d’information traverse l’espace et le temps dans les deux systèmes. Mais le temps est-il fondamental dans l’agencement de l’univers ou n’est-il qu’une propriété physique sans signification à l’échelle de Planck, qu’il sera un jour possible de débusquer ?

Publié dans Les deux infinis

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