genetique

Sur les traces des Polynésiens

Publié le par Ysia

Quelle est l’origine de mana et de Pele dans la mythologie polynésienne ? Odyssée de l’Asie du Sud-Est, Sumatra ou Inde, à la Polynésie en passant par les îles des Caraïbes...Dans l’Assemblée des Océans, les fils et filles du Dieu Soleil s’embarquèrent à la conquête du monde. Vairocana, créateur de l’Univers, symbolise la vacuité par laquelle tout a commencé. Il n’y a pas d’arbre de vie, tout juste un buisson furtif.

Hawaï est l’un des derniers lieux au monde à avoir été conquis par l’homme. Des milliers d’années après s’être installé à la pointe de l’Amérique du Sud, sur les hauteurs du plateau tibétain et même à la lisière glacée du Groenland, l’homme n’avait toujours pas posé le pied dans l’archipel volcanique. Quand il a, pour la première fois, tiré son canot à double coque jusqu’au rivage hawaïen, son voyage d’exploration a été l’un des plus grands triomphes de l’espèce humain. Pourtant, encore tout récemment, les archéologues n’avaient aucune certitude quant à la façon dont cet exploit a été réalisé. Les ancêtres des polynésiens actuels qui avaient établi des foyers de population dans quasiment tout le Pacifique, y compris Hawaï, faisaient partie de la dite civilisation Lapita du nom d'un site archéologique de Nouvelle-Calédonie. De l’Asie de l’Est, ils se sont dispersés il y a 3 000 ans, mais des questions demeurent quant à leur origine et les voies empruntées. Les archéologues ont découvert des centaines de sites archéologiques à travers le Pacifique ouest, parsemés d’objets tels que des haches en pierre et des résidus organiques qui permettent de suggérer que ces marins itinérants ont parcouru de longues distances, munis de vivres, de plantes et d’animaux depuis les grandes îles le long des côtes chinoises et de l’Asie du Sud-est. Vers 1 000 ans avant notre ère, ils avaient voyagé aussi loin que Samoa et peuvent être considérés comme les premiers Polynésiens. Les longues distances à parcourir pour atteindre les îles au-delà de Samoa, telles que les îles de la Société – plus de 2 400 kilomètres en haute mer – ont empêché la poursuite de leur périple migratoire pendant près de 2 000 ans. Les Polynésiens reprirent soudain la route bien que l’on ne sache pas pourquoi, vers le Pacifique est et central, une région aussi vaste que l’Amérique du Nord. Ils débarquèrent finalement dans l’archipel d’Hawaï, probablement dans un premier temps à Kauai non loin de la grotte de Makauwahi. La datation de ces périples a fait l’objet de vifs débats en grande partie du fait que les preuves archéologiques sont difficiles à recouvrer étant donné l’impact destructeur du climat chaud et humide qui prédomine dans les îles éparses du Pacifique et de l’acidité du sol volcanique. Ces deux facteurs détruisent les matières organiques telles que le bois, les fossiles végétaux et les ossements d’animaux qui permettent la datation précise par le radiocarbone. En outre, ces anciens marins n’ont laissé derrière eux aucun texte écrit ni aucune inscription. Néanmoins, contrairement à la plupart des autres sites archéologiques, les conditions qui prévalent à l’intérieur de la grotte de Makauwahi ont favorisé la conservation d’un grand nombre d’indices. Certaines des découvertes les plus précieuses on été faites sous la couche déposée par le tsunami il y a 400 ans. Ce sont les restes minuscules et fragiles d’une espèce ancienne de volaille… Quand les Polynésiens s’embarquaient vers de nouveaux horizons, la volaille faisait partie intégrante de leur nécessaire de voyage, leur fournissant non seulement la viande, les œufs et le divertissement – le combat de coqs reste très populaire dans la région – mais aussi les os pouvant être transformés en aiguilles à coudre, matériel de tatouage ou instruments de musique. S’ils laissaient parfois derrière eux les chiens et les cochons, ils emportaient toujours des poules vers de nouvelles destinations. Dans la mesure où les poules domestiques ne sont pas originaires des îles du Pacifique, la présence d’os de poule est un signe clair de l’activité humaine. Suivre ainsi la propagation des poules constitue un moyen pratique d’étudier le mouvement de population à travers la Polynésie... Les échantillons d’ADN comparés à d’autres échantillons prélevés en Polynésie ont révélé qu’un ensemble distinct de gènes caractérise l’espèce de poule ancienne. La répartition géographique de l’ADN montre clairement deux vagues d’expéditions, l’une se déplaçant dans un axe nord-est vers la Micronésie et l’autre, est vers Samoa et Hawaï. Les rats accompagnaient régulièrement les Polynésiens dans leurs voyages, se glissant à bord et sautant par-dessus bord à leur guise alors que ni les cochons ni les chiens ne faisaient pas, semble-t-il, partie du voyage vers les avant-postes tels que l’île de Pâques.

La boue dans la grotte de Makauwahi a également permis la préservation des résidus de charbon dispersés par le vent et incrustés dans la tourbe. La datation au radiocarbone des échantillons semble suggérer que l’emploi du charbon est rare jusqu’en 1200 de notre ère. Sa soudaine apparition est un autre indice de la présence de l’homme et de l’activité humaine quand il commença à brûler les feuillages pour planter des taros et autres denrées agricoles. Des nucléus ramassés dans d’anciens étangs bordés de pierre qui ont servi à produire le charbon ont donné lieu à une datation comparable, ce qui indique clairement et confirme sans doute que l’homme est arrivé beaucoup plus tardivement – presque 800 ans plus tard – que l’avaient pensé de nombreux historiens. Dans un aussi grand nombre que les os de volaille, de larges quantités d’hameçons en os et en nacre et des coquilles de 16 espèces de mollusques différentes ont été recueillis. Ces objets témoignent du début de la culture ancienne hawaïenne. Le feu n’est qu’un des moyens par lesquels ces nouveaux colons ont transformé le paysage de Kauai. En même temps que les rats, les insectes, notamment les fourmis, se sont glissés à bord des canoës. L’activité humaine ajoutée aux changements engendrés par les animaux et les plantes qu’ils avaient apportés permettent difficilement d’imaginer le milieu hawaïen avant l’arrivée des hommes, mais la grotte donne la preuve que cet environnement était autrefois radicalement différent… Les archéologues ont depuis longtemps soupçonné que l’arrivée des hommes à Hawaï a sonné le glas pour d’innombrables plantes et espèces animales. Près d’une cinquantaine d’espèces d’oiseaux, dont beaucoup sont aujourd’hui disparues, ont été découvertes dans la grotte de Makauwahi et les fouilles archéologiques, en particulier le long du littoral, ont confirmé la transformation rapide du milieu environnant à la suite de l’arrivée de l’homme. Bien que l’on estime que les premiers colons n’étaient qu’un groupe de 100 personnes environ, on déduit sur la base des données génétiques que les rats se sont rapidement propagés dans les îles, causant la mort des larges oiseaux inaptes au vol et vulnérables face à ces mammifères prédateurs. Les rats mangèrent aussi vite les graines des palmes indigènes tandis que les hommes ont vraisemblablement surexploité le bois pour construire leurs huttes, causant la quasi-disparition des arbres sur l’île Kauai. D’anciennes gravures réalisées par des Européens qui commencèrent à arriver vers la fin du XVIIIe siècle montrent que les abords de la grotte Makauwahi étaient presque entièrement déboisés alors – les plaines côtières transformées par l’irrigation et les étangs et les multiples feux de bois ont fait reculé la forêt vers des zones trop escarpées pour être cultivées.

Lorsque les Européens arrivèrent, quelque 600 ans après les premiers colons, les Hawaïens étaient probablement 200 000 environ. C’est un paysage de champs et de forêts avec quelques oiseaux étranges qui s’est offert à leurs yeux.

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Du dernier nœud de l’arbre phylogénétique

Publié le par Ysia

Les recherches génétiques se fondent essentiellement sur l’ADN des peuples européens. Il reste à découvrir ce que l’ADN des peuples d’Asie, d’Afrique ou des Noirs d’Amérique recèle… L’histoire de l’humanité rappelle la recherche mathématique d’un dénominateur commun. "Nous rapportons la découverte du chromosome Y d’un Noir américain portant trace de l’état ancestral de tous les SNP (single-nucleotide polymorphism) à la base de l’arbre phylogénétique du chromosome Y. Nous avons décodé un fragment d’ADN de 240 kilobases  sur ce chromosome permettant d'identifier les mutations individuelles dérivées de cette ancienne lignée dénommée A00. Nous avons estimé que le plus récent ancêtre patrilinéaire commun s’agissant du chromosome Y daterait d’il y a 338 000 ans (intervalle probable entre 237 000 et 581 000 ans), ce qui à  l’évidence va bien au-delà de la datation pour l’Ève mitochondriale ainsi que pour les fossiles humains dotés d’une anatomie moderne les plus anciens." La genèse de l’humanité moderne semble plus complexe que jamais. On peut conclure qu’une introgression naturelle d’une lignée humaine archaïque au sein de la population ancienne des Homo Sapiens modernes s'est effectuée.  C’est au Cameroun parmi le peuple Mbo que l’on retrouve trace de cette lignée ancienne. A suivre…

 

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Varilaku

Publié le par Ysia

Les populations insulaires présentent la fragilité des plantes natives et se cachent derrière un mur de réserve, une vulnérabilité qui n’a d’autre refuge qu’une île repliée sur elle-même.

  Polynesian figure

Les cheveux blonds sont un trait caractéristique de la population indigène à peau noire des Îles Salomon, conséquence d’une variante génétique localisée, distincte du gène à l’origine des cheveux blonds en Europe, d’après une nouvelle étude de l’École de médecine de  l’Université de Stanford.

L’étude identifie le gène responsable des cheveux blonds aux Îles Salomon, une nation du Pacifique Sud. C’est en prélevant des échantillons de salive et de cheveu sur 1209 résidents des Îles Salomon et en comparant la composition génétique de 43 individus blonds et 42 individus bruns des Îles que des différences sont clairement apparues dans un gène crucial, le gène TYRP1 (tyrosinase-related protein 1) localisé sur le chromosome 9 qui produit l’enzyme participant de la production de la pigmentation. Ce gène des cheveux blonds est récessif, c’est-à-dire qu’il est hérité des deux parents. Cette mutation génétique est spécifique aux Îles Salomon et est inexistante sur un échantillon de 941 personnes originaires de 52 populations ailleurs dans le monde. Si elle semble apparaître au hasard, cela n’en est pas moins particulièrement fréquent aux Îles Salomon. Les Îles Salomon sont également l’une des nations les plus diverses sur le plan linguistique, avec des dizaines de langues parlées. Il serait donc intéressant d’étudier à l'avenir si ces variations linguistiques sont en corrélation avec les variations génétiques.

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Géométrie de l’Espace et du Temps

Publié le par Ysia

Et que l’on reparle des formes géométriques

sur les coquillages à Trinil sur l’île de Java

Laissés par leurs auteurs anonymes il y a un demi-million d'années.

Île d’Islande,

Île de Nouvelle-Zélande

Terre de glace,

Pays du long nuage blanc

C’est à une île que mon âme aspire pour toucher le ciel de mon pinceau....

                        A l'orée de la grotte humaine...
Retour aux sources

Dans la réalité physique palpable et tangible, déterminée par la géométrie de l’espace et du temps, se définit le passé de la Polynésie.

L’article paru sur le site PNAS intitulé  Polynesian origins: Insights from the Y chromosome coécrit par un certain nombre de scientifiques chinois, anglais, américains et australiens confirme combien controversée est la question entourant la colonisation de la Polynésie. Deux hypothèses s’affrontent : l’une postulant que l’île de Taiwan serait la patrie présumée de ces colons, l’autre suggère une origine mélanésienne. Pourtant, sur un échantillon de 551 individus mâles de 36 populations vivant en Asie du Sud-Est, à Taiwan, en Micronésie, en Mélanésie et en Polynésie, pratiquement aucun haplotype du chromosome Y taïwanais ne se trouve ni en Micronésie  ni en Polynésie. En même temps, un haplotype spécifique aux Mélanésiens ne se rencontre pas non plus chez les Polynésiens. Toutefois, tous les haplotypes polynésiens, micronésiens, et taïwanais sont présents parmi les populations existantes d’Asie du Sud-Est. A l’évidence, les données fondées sur le chromosome Y ne corroborent aucune des deux hypothèses. Nous partons donc du postulat selon lequel l’Asie du Sud-Est est une source génétique de deux mouvements migratoires indépendants, l’un se dirigeant en direction de Taiwan et l’autre en direction de la Polynésie à travers les îles d’Asie du Sud-Est.

Les événements préhistoriques majeurs qui ont conduit à la colonisation de la Polynésie ont été examinés sous divers angles, et deux modèles suggérant le déplacement des populations ont été proposés. Le premier, surnommé le modèle du train express, fondé principalement sur  des preuves archéologiques et linguistiques, soutient que vers 4 000 à 5 000 ans avant le présent (BP),  un mouvement migratoire rapide en direction de l’Est a commencé dans le Sud de la Chine diffusant une langue austronésienne et une culture Lapita à travers les îles du Pacifique, culminant par la colonisation de la Polynésie. Suivant ce modèle, Taiwan, île limitrophe de l’Asie continentale, fut d’abord colonisé. Easter poleCette hypothèse s’appuie sur les données récentes relatives au génome mitochondrial (ADNmt), qui établissent un lien entre les aborigènes taïwanais et les  Polynésiens. La deuxième hypothèse propose une terre d’origine voisine des Polynésiens en Mélanésie, dans laquelle les Polynésiens entretenaient une toile complexe de relations avec les insulaires qui peuplaient alors le Pacifique.

Bien que la plupart des preuves génétiques favorisent la première hypothèse, le débat continue et d’autres scénarios plausibles sont également examinés. Notamment des études récentes suggèrent que de nouvelles données relatives au génome mitochondrial (ADNmt)  montrent en fait une origine en Indonésie orientale. A partir de l’analyse de 19 marqueurs bialléliques sur un échantillon de 551 chromosomes Y d’hommes originaires de 36 populations de l’Asie du Sud-Est, de la Micronésie, de la Mélanésie et de la Polynésie ont été identifiés 15 haplotypes. Si H1 est considéré comme étant l’haplotype ancestral du fait de sa présence chez les chimpanzés, parmi les autres haplotypes se trouvent H2 qui est également relativement ancien étant donné qu’il apparaît chez les populations africaines et non-africaines, et H5 qui est l’ancêtre commun de tous les autres haplotypes non-africains et présent au niveau régional. Les Asiatiques du Sud-Est, avec 14 haplotypes et une diversité haplotypique de 0,88, sont de loin la plus diverse des populations étudiées. Le seul haplotype manquant est H17, spécifique aux Mélanésiens. Les 58 aborigènes mâles taïwanais qui font partie de l’étude partagent 7 de ces haplotypes (H6–H12), avec une diversité haplotypique de 0,70. Deux de ces haplotypes (H6 et H7) ont seulement été observés au sein de la population de langue atayal. Sur les 113 Micronésiens et Polynésiens participant à l'étude ont été identifiés 10 haplotypes, avec une diversité haplotypique de 0,72, dont neuf (H1, H2, H4, H5, H6, H8, H10, H12, and H14) sont communs aux Asiatiques du Sud-Est. Le dixième haplotype est H17, qui se retrouve seulement chez deux individus de langue troukaise. Stone sinker

Une comparaison de la distribution des haplotypes chez les Micronésiens et les Polynésiens avec celle observée dans la population taïwanaise présente un certain intérêt. A l’exception de H6, les deux groupes de population partagent deux séries indépendantes d’haplotypes. H1, H2, H4 et H5 sont uniquement présents en Micronésie et en Polynésie. En même temps, les  haplotypes taïwanais H7, H8, H9, H10, H11 et H12 sont absents en Polynésie et relativement rares en Micronésie. En fait, Micronésiens et Polynésiens ne partagent que quatre haplotypes avec les Taïwanais, dont trois se retrouvent en Micronésie mais pas en Polynésie, ce qui suggère un flux génique plus récent de l’Asie du Sud-Est à la Micronésie. H1 (haplotype ancestral) et H5 (ancêtre commun de tous les autres haplotypes non-africains) brillent par leur absence au sein des populations aborigènes taïwanaises, alors qu’ils sont largement présents dans presque toutes les populations micronésiennes et polynésiennes. A l’évidence, les populations aborigènes taïwanaises d’une part et, d’autre part, Micronésiens et Polynésiens, possèdent deux sous-ensembles distincts d’haplotypes présents parmi les populations existantes de l’Asie du Sud-Est. Le calcul des distances génétiques montrent que l’écart entre Taïwanais et populations micronésiennes et polynésiennes est deux fois plus important que celui qui sépare les deux groupes de population de l’ensemble des Asiatiques du Sud-est. 

Suivant le modèle du train express, le peuplement de Taïwan s’est produit il y a 5 000 à 6 000 ans suite à un flux migratoire proto-austronésien depuis les côtes du Sud de la Chine. Bien que les langues austronésiennes ne soient plus parlées dans cette région, les données recueillies n’excluent pas la possibilité que des Chinois originaires de la côte méridionale aient été les membres fondateurs des aborigènes de Taïwan puisque les haplotypes du chromosome Y spécifique aux Taïwanais constitue un sous-groupe présent dans l’ensemble de l’Asie du Sud-est, y compris en Chine méridionale. Notons que certaines populations vivant sur le littoral chinois ( Tujia, Yao, Dong, She, Li, et Zhuang) et mentionnées dans cette étude, qui, avec l’expansion des Hans au cours des 2 000 dernières années, s’étaient déplacées vers le Sud-Ouest de la Chine (Yunnan, Guizhou, and Sichuan), présentent un profil marqué par l’haplotype du chromosome Y, similaire aux autres populations de l’Asie du Sud-Est. A l’évidence, cela suggère un continuum génétique à travers toute l’Asie du Sud-est, y compris la Chine méridionale, continentale et les îles du Sud-est, indépendamment de la famille linguistique auxquelles elles appartiennent (sino-tibétaine, hmong-mien, austroasiatique et austronésiennne). En dépit de ces observations, les données fondées sur le chromosome Y ne privilégient pas l’hypothèse d’une terre d’origine des Polynésiens à Taïwan. Toutefois, ces constatations ne réfutent pas entièrement le modèle du train express, qui suppose la diffusion de la langue austronésienne et de la culture Lapita depuis l’Asie du Sud-est. En outre, le fait que la diversité haplotypique soit au niveau le plus élevé en Asie du Sud-est comparativement aux autres populations renforce la thèse d’une terre d’origine en Asie du Sud-est. L’explication la plus plausible tend à confirmer qu’aussi bien les Taïwanais que les Polynésiens sont issus d’un ancêtre originaire de l’Asie du Sud-est. Quoi qu’il en soit, la colonisation de la Polynésie s’est effectuée par une route migratoire depuis l’Asie du Sud-est  et indépendante de celle  allant vers Taïwan. A l’heure actuelle, il n’est pas possible de localiser avec certitude le point d’origine de ces ancêtres polynésiens. statuette

Il faut relever une fois de plus la présence quasi exclusive de H17 dans la population mélanésienne si ce n’est dans un groupe micronésien (12% au sein de la population de langue troukaise). L’absence de H17 dans la population polynésienne suggère une contribution négligeable à l’expansion  polynésienne des haplotypes du chromosome Y spécifique aux Mélanésiens, par contraste avec la proportion plus élevée des allèles mélanésiens à partir  de l’ADN nucléaire et de l’ADN mitochondrial, ce qui pourrait s’expliquer par le fait que c’est le processus de reproduction qui a surtout contribué à la colonisation du Pacifique, à l’exemple d’autres expansions géographiques dans le monde, en vue de pallier au goulot d’étranglement démographique. Dans le contexte de l’histoire récente de la Polynésie, l’apport européen reste encore à démontrer et ne saurait masquer la trace génétique du premier flux migratoire de la Préhistoire en Polynésie.

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Le mystère des Origines

Publié le par Ysia

 

Dans l'article Probing deeper into first American studies par Tom D. Dillehay , Départment d'anthropologie, Université de Vanderbilt, édité par Jeremy A. Sabloff, Université de Pennsylvanie, Musée d'archéologie et d'anthropologie, Philadelphie, et publié sur le site PNAS, son auteur concède que la question du peuplement initial de l’Amérique s’avère l’une des plus énigmatiques de la préhistoire du monde. Malgré les nombreuses avancées qui ont permis d’approfondir notre compréhension dans le domaine de la génétique et les découvertes archéologiques récentes, le débat se poursuit quant à la datation et aux routes empruntées par le mouvement migratoire.

Des diverses routes de peuplement possibles, la Béringie, un pont terrestre entre la Sibérie et l’Alaska, est la plus probable. Une population asiatique a pour la première fois colonisée l’Amérique du Nord au sud de la calotte glaciaire, depuis la Béringie, probablement il y a entre 20 000 et 15 000 ans avant le présent (BP). A mesure que les données archéologiques seront rendues disponibles, les chercheurs connaîtront mieux les diverses routes de migration prises par différentes populations à différentes périodes historiques. Si le lien entre les traditions culturelles de la Sibérie et de la Béringie a clairement été mis en évidence avec les sites archéologiques d’Uskhi en Sibérie et de Nenana en Alaska, les découvertes archéologiques sont plus éparses en Amérique du Sud. C’est la culture Clovis - ainsi nommée après le site du Nouveau-Mexique datant de 12 000 ans BP environ - et ses pierres taillées qui sont jusqu’à présent les mieux documentées. Ces dernières décennies, diverses pointes lithiques et technologies, dont certaines d’avant la culture Clovis et d’autres contemporaines, ont été découvertes. Il existe un nombre suffisant de sites archéologiques dans tout le continent américain qui confirment l’existence d’une présence humaine avant la culture Clovis. En Alaska et dans le nord-ouest du Canada, quelques sites pré-Clovis (Bluefish Cave, Old Crow)  nécessitent des études supplémentaires pour confirmer leur datation. Plus au Sud, il y a Schaefer et Hebior (entre 14 800 et 14 200  ans BP) dans le Wisconsin, La Sena (entre 22 000 et 20 000 ans BP) dans le Nebraska, Lovewell (vers 19 000 ans BP) au Kansas, et Page-Ladson (vers 14 000 ans BP) en Floride. D’autres sites offrent des preuves solides d’une datation pré-Clovis, notamment l’abri de Meadowcroft (entre 22 000 et 13 400 ans BP) en Pennsylvanie, Cactus Hill (entre 20 000 et 18 000 ans BP) en Virginie, et probablement Topper en Caroline du Sud. La question des premiers peuplements en Amérique est rendue plus complexe par la découverte de traditions différentes des cultures lithiques sibériennes, notamment Cactus Hill et Page Ladson qui n’ont aucun antécédents convaincants dans la steppe russe, en Sibérie ou en Béringie. Certains outils découverts dans ces sites présentent toutefois des étapes similaires du processus de fabrication lithique de la culture solutréenne franco-cantabrienne datant de 21 000  à 18 000 ans BP. Les informations recueillies en Amérique centrale, pont terrestre entre le Nord et le Sud, sont trop rares et fondées principalement sur les pointes du type Clovis et autres pointes ramassées en surface. Des fouilles entreprises dans un petit nombre de sites  (notamment Tlapacoya au Mexique) ont produit des données stratigraphiques dont l’importance reste à démontrer. Bien que des études soient menées actuellement au Mexique, au Panama et dans d’autres pays,  il reste nécessaire d’approfondir les recherches archéologiques dans l’ensemble de l’Amérique centrale. L’archéologie de la fin du pléistocène en Amérique du Sud  présente des caractéristiques différentes car aucune culture n’a dominé cette région comme l’a fait la culture Clovis durant une brève période en Amérique du Nord. Les premières technologies consistent en différents types d’outils de pierre taillée, notamment une large variété de bifaces (Monte Verde, Fishtail, Paiján, El Jobo) et d’unifaces. Des datations plus précises ont montré une succession d’industries souvent diamétralement différentes, surtout dans les Andes, dans l’Est du Brésil et en Patagonie. Certains facteurs expliquent probablement cette diversité dans l’hémisphère Sud, notamment des barrières géographiques (Andes et Amazone) qui ont empêché les mouvements de population, des changements climatiques, la transformation des zones de ressources et l’évolution des conditions sociales.  Le seul lien possible entre l’Amérique du Nord et l’Amérique du Sud serait, pour certains experts, la présence de cannelures sur les pointes de Clovis et peut-être les pointes en forme de queue de poisson, qui proviendraient selon d’autres experts de la Patagonie. Plusieurs sites en Amérique du Sud sont antérieurs à la culture de Clovis, notamment Monte Verde vers 14 500 ans BP au Chili, probablement Taima–Taima vers 13 000 ans BP au Venezuela, Santana do Riacho et Lapa do Boquete vers 14 000 ans BP au Brésil.

La reconstruction du lien biologique et des mouvements de population, sur la base du génome mitochondrial (ADNmt)  et du chromosome Y, a considérablement bouleversé l’étude de la colonisation de l’Amérique. La génétique est non seulement devenue un outil puissant dans la recherche des origines des premiers Américains mais, tout comme l’archéologie et l’anthropologie biologique, elle a donné la preuve de la diversité des peuples anciens. Les analyses génétiques indiquent que la plupart des Amérindiens ont une origine asiatique unique et possèdent les cinq haplogroupes qui forment le lignage fondateur. La dissémination de ces haplogroupes suggère soit un seul mouvement migratoire majeur de l’Asie au Nouveau Monde soit de multiples vagues migratoires originaires d’une  population génétiquement homogène quelque part au nord-est de l’Asie orientale. D’anciens marqueurs d’ADN prélevés sur des squelettes humains suggèrent des haplotypes nord-américains d’origine asiatique et un seul haplotype non amérindien. Des analyses récentes ont confirmé la présence de plusieurs sous-haplogroupes et de leurs dérivés, suggérant des mutations de populations autochtones géographiquement isolées en Béringie ou dans une région voisine avant leur dispersion sur l’ensemble du continent américain. Les échantillons prélevés d’ADNmt à partir de 14 coprolithes humains datant de 14 100 ans BP dans la caverne de Paisley dans l’Oregon appartiennent aux deux haplogroupes les plus répandus dans la population amérindienne moderne et suggèrent un lien biologique avec les peuples anciens de l’Asie de l’Est. Egalement présent dans l’ADN des populations actuelles sont les deux haplogroupes du chromosone Y (C,Q) considérés comme le lignage paternel. Q et ses dérivés quasiment présents chez tous les Amérindiens révèlent une origine en Sibérie. Des conclusions récentes suggèrent également que tous les groupes indigènes dérivent d’une population ancestrale commune, ce qui explique la dissémination de l’allèle ((9AR) sur tout le continent américain à la fin du pléistocène. Dans leur ensemble, les données génétiques suggèrent que tous les lignages majeurs de la population amérindienne actuelle sont représentés parmi les populations modernes du nord-est de l’Asie et qu’une à quatre vagues migratoires se sont succédées depuis cette région de l’Asie aux Amériques. La thèse la plus largement acceptée est une seule vague de migration entre 20 000 et 12 000 ans BP le long de la côte pacifique ou le long d’une route intérieure par les terres septentrionales entre les calottes Laurentide et de la Cordillère vers 14 500 ans BP. D’autres études suggèrent de multiples migrations  le long de la côte et à travers les terres. A l’heure actuelle, l’horloge moléculaire date l’entrée de l’homme en Amérique entre 30 000 et 15 000 ans BP, suivant les mutations génétiques et la vitesse à laquelle elles sont intervenues. En Amérique du Sud, la signature génétique est moins évidente qu’en Amérique du Nord, ce qui rend plus délicate la question de dater et de déterminer le nombre de vagues migratoires. Les indices actuels suggèrent que le lien qui lie l’Amérique du Sud à l’Amérique du Nord est moins évident que celui qui lie l’Amérique du Nord à la Sibérie. Du fait de la grande distance qui sépare le Nord du Sud, il n’est pas surprenant que les différents processus démographiques, biologiques et environnementaux aient affecté les données à travers le temps et l’espace, d’autant que des échanges entre Béringiens et Américains du Nord ont plus aisément pu avoir lieu même après la première vague d’expansion en Amérique. Des études suggèrent en outre que les populations des Andes diffèrent génétiquement de celles habitant les basses terres tropicales  de l’Est, ce qui pourrait être le résultat de deux vagues migratoires séparées, de différents niveaux de peuplement, et/ou du flux génique entre et au sein des populations régionales, conséquence principale de la densité de population et des conditions géographiques. Les généticiens ont également suggéré qu’une plus grande diversité génétique et une structure démographique moins favorable à l’Ouest par rapport à l’Est de l’Amérique du Sud expliquent cet écart, même si les deux populations dérivent probablement de la même population fondatrice. D’autres recherches et collectes de données sont nécessaires pour corroborer ces thèses, d’autant que la datation de la colonisation par l’homme de l’Amérique du Sud reste à déterminer et à concilier avec la datation archéologique. Les études génétiques ont leurs limites car les chercheurs doivent s’entendre sur les unités de mesure utilisées (unité démographique, groupes génétiques tels que les haplogroupes) et tourner de plus en plus leur attention des populations locales actuelles aux populations anciennes. Le cas des squelettes humains datant de l’holocène notamment l’Homme de Kennewick dans l’Etat de Washington, l’Homme de la Grotte de l’Esprit au Nevada et la Femme de Buhl dans l’Idaho, peut-il être représentatif des populations de la fin du pléistocène, en dépit des quelques milliers d’années les séparant ou encore des tout premiers Américains desquels 350 générations au moins les séparent ?  S'il faut admettre que des échanges démographiques sont intervenus entre les différents groupes dans le temps et l’espace et tenir compte des facteurs de la dérive génétique,  du flux génique et de l’isolement géographique, encore faut-il pouvoir prouver avec certitude que le tableau génétique des squelettes du pléistocène a été altéré par les vagues de populations successives !  La découverte de nouveaux squelettes et la collecte des données génétiques seront cruciales.

Le nombre restreint de sites funéraires datant de la fin du pléistocène en Amérique contraste avec leur présence plus visible en Australie et dans d’autres régions du monde. Les raisons restent indéterminées. L'analyse morphométrique crânienne porte certains chercheurs à conclure que deux populations se sont introduites à des périodes différentes en Amérique et dont les origines biologiques et génétiques rassemblent non seulement les populations du Nord-est de l’Asie, mais aussi du Sud-Est et probablement de l’Europe, de l’Afrique et les Mélanésiens d’Australie. La forme crânienne la plus ancienne du Paléoaméricain offre des ressemblances avec les premiers hommes modernes qui s'observent aujourd’hui chez les Africains et les  Mélanésiens d’Australie. La forme crânienne plus récente est mongoloïde. Bien qu’il soit toujours possible que ces deux types crâniens constituent des formes extrêmes d’un processus continu de variations morphologiques, certains chercheurs sont convaincus que ces ressemblances crâniennes des populations anciennes d’Amérique du Sud, et à une moindre mesure d’Amérique du Nord, avec les Africains et Mélanésiens d’Australie suggèrent que des populations différentes de celles du type mongoloïde ont colonisé l’hémisphère Sud. En conclusion, ces variations crâniennes, compliquées par une discontinuité entre le début de l’holocène et l’holocène moyen, peuvent être le résultat d’une adaptation climatique, d’une dérive génétique, ou le fait que les premiers colons eux-mêmes formaient un groupe hétérogène.

Théories, méthodologies et approches empiriques dans les divers domaines scientifiques ont du mal à se réconcilier entre elles et à faciliter une meilleure compréhension de la première vague de colonisation de l’Amérique. Si la diversité des indices archéologiques, génétiques et morphologiques est plus largement reconnue,  il reste qu’un effort interdisciplinaire simultané est nécessaire aujourd’hui pour mieux recouper géographiquement et historiquement l’ensemble des données interdisciplinaires rigoureusement et uniformément prélevées.

Un élément encore ignoré est la place de l’art rupestre dans l’histoire de la colonisation de l’Amérique et son interprétation. Comment définir le cadre ontologique de ces recherches interdisciplinaires ? Faut-il parler d’un  processus de migration systémique ou de phénomènes culturels évolutifs localisés dans le temps et l’espace ? De manière plus générale, une étude comparative de la colonisation de l’Amérique avec celle d’autres continents par l’homme suivant des paradigmes biologiques, écologiques et anthropologiques doit également être menée.

Publié dans Génétique

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